Vendu comme un film dans la lignée de Pauvres Créatures ou The Substance, The Ugly Stepsister revisite Cendrillon avec un autre point de vue, et s’aventure dans l’horreur. Pour le meilleur, mais aussi le pire.

Encore une adaptation

La revisite de contes populaires est une chose très répandue. Disney en a fait sa spécialité, mais d’autres cinéastes s’y sont aussi attelés. Cela pouvait être des adaptations fidèles au récit originel ou bien des inspirations plus libres (comme le singulier Hansel et Gretel : Witch Hunter). Parmi tous, l’un des contes les plus référencés est celui de Cendrillon. Que ce soit dans la pop culture avec Shrek 3, dans les adaptations ou les revisites, ce personnage est devenu une icône importante, maintes fois travaillée.

La réalisatrice Emilie Blichfeldt apporte une nouvelle version de cette histoire avec The Ugly Stepsister, et plus spécialement un nouveau point de vue. Au lieu de suivre cette intrigue par les yeux de Cendrillon (qui s’appelle Agnes dans le film), la cinéaste place sa caméra du côté d’une des demi-sœurs. Un simple changement qui renverse totalement la perception de cette histoire déjà bien connue. Une idée intéressante sur le papier, mais qui ne fonctionne pas forcément sur tous les aspects.

The Ugly Stepsister
Lea Myren et Adam Lundgren (Photo de Marcel Zyskind © Shudder)

La beauté dans la souffrance ?

Comme dans le récit d’origine, Agnes (Cendrillon) perd son père alors qu’il vient de se remarier. Elle se retrouve donc avec une belle-mère et deux belles-sœurs, et n’est que peu appréciée par cette nouvelle famille, surtout par la matriarche. Toutes se retrouvent aussi endettées, cherchant désespérément un moyen de regagner de l’argent. Survient l’invitation par un prince à un bal qui a pour objectif de lui trouver une épouse. Elvira, l’aînée des belles-sœurs, est amoureuse depuis toujours de ce dernier. Les deux jeunes filles vont participer à cette fête : la première par obligation, la seconde par amour, mais toutes deux aussi par intérêt financier.

Débute ainsi une longue préparation tant physique que psychologique. La différence étant qu’Elvira est considérée par tout le monde, y compris elle-même, comme moins belle qu’Agnes. Elle se lance dans une transformation de son corps particulièrement agressive. À l’instar d’un The Substance, Emilie Blichfeldt convoque le body-horror pour dénoncer les contraintes du diktat de la beauté. Critique de l’adage « il faut souffrir pour être beau », The Ugly Stepsister fonctionne plutôt bien sur cet aspect. Le spectateur est confronté à plusieurs scènes difficiles à regarder, montrant les horreurs que certaines s’infligent pour correspondre à des canons de beauté arbitraires.

The Ugly Stepsister
Lea Myren © Shudder

Trop kitch et bordélique

Cependant, le long-métrage trébuche dans sa narration. Même si l’histoire de Cendrillon est connue de tous, le fait de la voir par les yeux de la belle-sœur a pour conséquence qu’il manque des parties du récit. Elles sont soit peu développées, soit totalement absentes. Quand bien même le spectateur les connaît déjà parce qu’il aurait vu d’autres versions du conte, un film est censé se suffire à lui-même. Force est de constater que ce n’est pas le cas pour The Ugly Stepsister.

À cela s’ajoute un parti pris de réalisation qui peut déranger. La cinéaste norvégienne place son intrigue à l’époque du conte, mais elle utilise pour certaines scènes une esthétique faisant écho aux comédies romantiques et films fantastiques des années 60-70. Ainsi, on retrouve une ambiance proche des films comme Peau d’Âne de Jacques Demy. Sauf que là où ce film de 1970 arborait un style nanardesque, The Ugly Stepsister fait cela au premier degré, et à plusieurs reprises. Malgré ce décalage étrange, on comprend l’objectif esthétique et scénaristique derrière. Ce sera au spectateur d’adhérer ou non à ce style.

The Ugly Stepsister propose une revisite intéressante du conte de Cendrillon. Mais, parfois, à trop vouloir revoir le mythe, on s’y perd. Le long-métrage regorge d’idées, d’ambition, mais n’est finalement pas assez éloigné de l’histoire originale pour nous surprendre. Son aspect horrifique et pop ne sauve malheureusement pas ses problèmes de narration. Finalement, on a l’impression d’avoir eu une œuvre cherchant constamment à garder notre attention en agitant des clés.

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