Se pourrait-t-il que ce nouveau Sam Mendes soit le moins profond de toute sa filmographie, pas forcément le moins bon, mais celui qui ne fait que rester en surface de ses thématiques ce qui lui coûte d’être le moins pertinent dans une liste bien garni ?

Mendes et une Amérique en difficulté

Lorsqu’on a réalisé American Beauty soit le parfait portrait d’une famille imparfaite ou tous ne font que se mépriser par derrière, ou encore Les Noces Rebelles la caricature par excellence sur un couple faussement heureux dans les petits quartiers résidentiels américains, que raconter de plus après ça. Sam Mendes n’est pas le réalisateur le plus optimiste du cinéma. Il n’a majoritairement abordé que des situations de crises, dans chacun de ses films où résident des conflits qui éclatent à l’acte final et les dénouements sont rarement bons. Et c’est tout aussi valable pour ses films de guerre Jarhead et 1917 qui épate plus par sa mise en scène prétentieuse que par un scénario bien creux. Heureusement pour Mendes, Skyfall a eu lieu et s’en est suivi un Spectretrès bon aussi.

un manque de profondeur

Et donc après Quentin Tarantino (Once Upon A Time In Hollywood), Damien Chazelle (Babylon), Steven Spielberg (The Fabelmans) et bien d’autres voilà la déclaration d’amour de Mendes au cinéma avec Empire Of Light. Ce déroulant entre les salles désaffectées ou inoccupées du cinéma Empire, deux employés d’une éthique différente vont tomber amoureux. Et on le sait, les histoires d’amour chez Sam Mendes c’est toujours très compliqué, même s’il utilise le cinéma en arrière plan. Malgré quelques beaux instants romantiques, on lit péniblement entre les lignes. On devine notamment l’intention de Mendes d’évoquer le racisme à travers le personnage de Stephen (Micheal Ward) et de la relation qu’il va construire avec Hilary (Olivia Colman), et justement du regard d’autrui sur leur alchimie. Mais tout cela n’est qu’effleuré.

Et si on prend en considération les quelques minutes ou l’on assiste au même titre qu’Hilary aux agressions physiques et verbales de Stephen, cette thématique n’est pas assez exploitée. Et d’ailleurs n’aurait-t-il pas fallu choisir quel sujet traiter ? Le racisme dans l’Angleterre des années 80 ou le quotidien d’un petit multiplex isolé au bord de la mer ? Voir une femme mentalement instable qui va tenter de se ressaisir au contact humain. Difficile à discerner, le film va dans tous et aucun sens à la fois.

Empire of Light 1
Michael Ward et Olivia Colman dans la peau de deux individus tourmentés dans Empire of Light. © Searchlight Pictures

une routine cinématographique

Très vite une certaine monotonie s’installe dans ce drame aux sentiments naissants et interdits entre deux natalités. Une quinquagénaire qui jour après jour ouvre le cinéma à l’heure indiquée, déjeune avec ses collègues, et se donne à quelques ébats discrets avec son patron (Colin Firth), tout cela est très routinier. Jamais le film nous emporte. Tout du long nous restons sur la même note sage et paisible comme celle qui règne dans le cinéma. La musique se fait trop discrète pour qu’on puisse en retenir une partition, et même Roger Deakins ne fait pas briller la pellicule comme il sait si bien le faire. On ne retiendra qu’une magnifique scène de feu d’artifice ou la photographie est particulièrement sublime, sinon c’est un travail un peu décevant. Peut-être pas assez inspiré.

Empire of Light 2
Hilary (Olivia Colman) s'émeut de sa première expérience dans les salles obscures. © Searchlight Pictures

une déclaration qui ne fonctionne pas (vraiment)

Empire Of Light peut vraiment compter sur la performance de Olivia Colman, qui joue une femme forte mais vulnérable et sujette à des comportements limites. Son alchimie avec Ward est finalement tout ce qu’on peut retirer de bon de cette « déclaration d’amour au cinéma ». Comme pour nous convaincre de ses intentions, Sam Mendes place Colman face à l’écran pour réitérer l’image désormais habituelle du personnage ébahi et ému par les sensations que peut proposer un film diffusé en salles. C’est beau, c’est sûr, mais un peu redondant, d’autant que les émotions manquent à l’appel.

On aurait pu croire qu’une héroïne qui va vivre une jolie histoire d’amour au contact des salles obscures devant la caméra de Sam Mendes était la promesse d’un drame amoureux plein de poésie, hélas pas vraiment. Si Empire of Light est loin d’être désagréable à regarder, ce ne sera pas le film le plus marquant de 2023 malgré son potentiel.

Le film est toujours disponible en salles.

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