Cette année, en compétition au Festival de Cannes, les cinéphiles ont pu découvrir le prochain film de Justine Triet. Intitulé Anatomie d’une chute, il s’agit d’un drame judiciaire avec l’allemande Sandra Hüller et le français Swann Arlaud. Nous y suivons le procès d’une femme accusée du meurtre de son mari avec qui elle vit dans la montagne et a eu un fils malvoyant… Très chaudement accueilli, il est reparti de Cannes avec la Palme d’Or. Ainsi, en préparation pour ce film prévu pour sortir dans les salles françaises le 23 août prochain, nous vous invitons déjà à découvrir un très bon précédent film de Justine Triet : Victoria.

Vincent Lacoste, Melvil Poupaud et Virginie Efira dans Victoria (Justine Triet, 2016)
Vincent Lacoste, Melvil Poupaud et Virginie Efira dans Victoria (Justine Triet, 2016) © Ecce Films

UN EXCELLENT TRIO DE COMÉDIENS

Dans Victoria, nous suivons les peines professionnelles et sentimentales d’une avocate surmenée qui donne son nom au film. En effet, elle doit d’abord défendre son ami Vincent, accusé d’avoir poignardé sa femme durant son mariage. Ce qu’elle accepte de faire en dépit des conflits d’intérêt. Ensuite, alors qu’elle embauche comme homme au pair un ex-dealer qu’elle a défendu précédemment, en la personne de Sam, rajoutons que Victoria engage une poursuite envers son ex. Ce dernier, aspirant écrivain, a en effet rédigé une œuvre qui n’est pas sans évoquer sa relation avec Victoria. Qu’il n’hésite pas à descendre allègrement sous couvert de fiction…

Dès son excellent premier long-métrage La Bataille de Solférino, Justine Triet a démontré ses obsessions pour les couples divorcés, mais surtout pour le monde judiciaire, pour les procès. Aux côtés de Virginie Efira, Vincent Lacoste et Melvil Poupaud, elle reparle de ces sujets dans cette comédie fort réussie. Déjà par le charisme de ses interprètes. Poupaud est excellent dans son rôle d’homme parfois ridicule dans son désespoir. Vincent Lacoste surprend dans ce rôle d’ex-dealer qui a payé ses dettes. Il se révèle parfaitement crédible en homme sérieux qui sert de barque et de soutien à Victoria. Et évidemment, on ne peut pas ne pas citer Virginie Efira. Elle endosse à merveille différents visages (dépressive, dépassée, battante…) pour notre plus grand plaisir. Son personnage lui-même est d’ailleurs des plus intéressants à suivre tant il s’agit avant tout d’une femme en pleine quête vers la paix intérieure…

Melvil Poupaud et Virginie Efira dans Victoria (Justine Triet, 2016)
Melvil Poupaud et Virginie Efira dans Victoria (Justine Triet, 2016) © Ecce Films

QUAND L’ABSURDE S’INFILTRE DANS UN QUOTIDIEN TERRE-À-TERRE

Ce qui marque dans ce film est le ton tout particulier que donne Triet à son histoire. Rendant hommage aux screwball comedies, la réalisatrice donne à ce genre l’aspect très terre-à-terre qui a fait sa renommée dans La Bataille de Solférino. Aspect qui passe par un cadre très réaliste et des personnages complexes, aux multiples visages. Mais Victoria est avant tout une comédie de mœurs qui nous emmène constamment sur le fil entre réalisme et fantaisie. En effet, guidé par le surmenage de Victoria, il ressort d’abord du film une sorte de mélancolie. Mais au-dessus plane comme une légèreté absurde. L’aspect comique de Victoria réside dans l’absurde par certaines situations folles. Mais aussi par certains personnages drôles par leur bêtise certaine. Ces pitreries sont toujours traitées sans souligner l’absurdité de la chose, créant un délicieux pince-sans-rire.

Au-delà des situations, viennent participer à l’absurde les dialogues du film. Si certains sont rafraîchissants par leur aspect cru et leur absence de tabous, d’autres viennent exploiter ce fameux fil ir/réalisme. Il suffit de penser au personnage de l’ex de Victoria (Laurent Poitrenaux) dont le langage est fort châtié pour être crédible… le rendant ainsi bien drôle. En bref, Victoria est une superbe comédie à l’humour pince-sans-rire rafraîchissant. On pourra peut-être lui reprocher une conclusion dans laquelle quelques aspects restent en demi-teinte, mais dans lequel réside tout de même un bel optimisme réaliste. Reste malgré tout un vrai plaisir que cette comédie de mœurs dans laquelle Efira, Poupaud et Lacoste sont réellement au top.

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