Écrit et réalisé par Valérie Donzelli, l’Amour et les forêts convoque Virgine Efira et Melivil Poupaud pour un drame psychologique marquant et nécessaire. Le film a été présenté dans le catégorie Cannes Première, au Festival de Cannes 2023.
Quand Blanche (Virginie Efira) croise le chemin de Gregoire (Melvil Poupaud), elle pense rencontrer celui qu’elle cherche. Les liens qui les unissent se tissent rapidement et leur histoire se construit dans l’emportement. Le couple déménage, Blanche s’éloigne de sa famille, de sa sœur jumelle, s’ouvre à une nouvelle vie. Mais fil après fil, elle se retrouve sous l’emprise d’un homme possessif et dangereux.
une inventivité épatante
Voici un film qui a du caractère. L’Amour et les Forêts est le voyage d’une femme en enfer, un enfer qui prend bien des formes. Tout au long de sa durée, on peut assister à un lent changement de ton, instauré par une modification drastique de tous les éléments de mise en scène qui composent le film. Valérie Donzelli fait ainsi preuve d’une inventivité épatante : elle réussit à illustrer chaque intention des 105 minutes de son film de mille manières différentes, et toujours dans l’originalité.
Le film dans son ensemble a été pensé pour évoquer cette sensation de « trop plein ». Dès les premières secondes, on aperçoit des images rapides et vagues de la forêt, des plans en argentiques qui, tout au long du film, vont se mêler aux drames pour évoquer ce désir de paix, ce tranquille repos loin des cris et des coups. D »ailleurs, les plus grands moments de bonheur seront aussi filmés de cette manière, comme ce plan du mariage, rappelant celui sur Julie Delpy dans Trois Couleurs : Blanc.
un film indispensable
Le film continue, et on se retrouve bousculé de tous les côtés, la lisibilité est sans cesse brouillée : on change de temporalité dans un même plan (en modifiant rapidement l’éclairage), on fait des cuts au milieu de fondus au noir, la voix off empiète sur les dialogues…c’est comme si la lucidité s’était envolée. Blanche n’est d’ailleurs contrainte à ne répondre que par des « moi aussi » à Greg. Et soudain, tout retombe. L’ambiance devient froide, les cadres stables, les mouvements lents. Tout s’alourdit. Le traumatisme s’immisce partout, dans les plus petits recoins artistiques qu’offre le cinéma. Départs de musiques sur les mots « pleurs », « monstre », et sur le « viol » admirablement passé sous silence. On éclaire des scènes en rouge, en bleu, en vert, on ne cadre que les visages, au diable les décors.
C’est ici que l’on rencontre le talent terrifiant de Virginie Efira. Quand on tombe dans la terreur du quotidien, le film a ralenti, laisse de la place à ses interprètes pour toucher du doigt une réalité terrifiante. Efira disait en effet que les scènes de bonheur avaient été tournées en dernier. C’est ce qui fait sans doute l’une des plus grandes forces du film : on ressent déjà le malaise et les mauvaises intentions chez Greg. Le mieux serait de lancer ce film sans rien y connaitre pour ainsi se laisser surprendre par les événements, et expérimenter la surprise et la bizarrerie plutôt que l’attente et la frustration face à l’ignorance du personnage principal. De toute manière, L’Amour et les Forêts est un film indispensable, intelligent et surtout, vraisemblable, c’est justement ce qui fait peur. Ce qui ressort au final, c’est la pudeur et le respect de la réalisatrice face à son personnage. De toutes les émotions, c’est l’empathie que l’on porte à Blanche et l’admiration que l’on porte au film qui triomphent.
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