Halloween II, film de 1981 réalisé par Rick Rosenthal avec Jamie Lee Curtis, Donald Pleasance, Dick Warlock…

Il n’est jamais chose aisée que de devoir prendre la suite d’un film qui a été un succès commercial et critique, et qui deviendra l’un des plus grands représentants du genre horrifique. C’est pourtant le défi devant lequel s’est retrouvé Nick Rosenthal lorsque John Carpenter lui a confié les clés de la réalisation d’Halloween II : celui-ci avait en effet refusé, par peur d’une redite, de réaliser le second opus de la saga de Michael Myers, et, après avoir été séduit par son travail sur la série Secrets of Midland Heights, avait choisi Rosenthal pour diriger la suite.
Bien sûr, John Carpenter n’était pas loin sur le projet : à l’oeuvre à la musique (avec son compositeur de toujours Alan Howarth) et au scénario (avec sa femme Debra Hill), il était également producteur du film. Il s’assurait donc un certain contrôle sur le long-métrage, évitant que Rosenthal ne ruine l’héritage de celui-ci.
Mais alors, comment s’est débrouillé Rick Rosenthal avec cet héritage, et que vaut Halloween II ?

HalloweenII-1.png 

Le film est donc la suite directe du premier Halloween, reprenant (avec quelques petites modifications peu importantes) là où le premier film s’était arrêté : Michael Myers, pourtant sous le choc des six balles assénées par le docteur Loomis, s’est évaporé dans la nature, et Laurie est emmenée à l’hôpital après un tel traumatisme.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’influence de Carpenter sur le travail de Rosenthal se sent tout au long du long-métrage. Conservant (avec plus ou moins d’efficacité, on y reviendra) l’ambiance qui était celle du premier opus, Rosenthal crée une suite cohérente, dans son fond et dans sa forme, avec son prédécesseur.
Malheureusement, et ça sera là un premier reproche, n’est pas Carpenter qui veut. Car là où toute la maestria visuelle de Carpenter faisait de Halloween une expérience réellement marquante, Rick Rosenthal ne dispose pas du même savoir-faire, flirtant bien plus avec le thriller qu’avec l’horreur (et ce n’était vraisemblablement pas l’ambition du film), ou ne faisant que singer, le talent en moins, la mise en scène de son prédécesseur.

Rosenthal reprend par exemple cette fameuse scène d’introduction du premier opus, où la caméra en vue subjective révélait à la fin l’identité du tueur, le jeune Michael Myers. Une scène émotionnellement forte, qui brusquait les rapports moraux du spectateur au long-métrage et créait l’incarnation du mal que représente Michael Myers.
Dans celui-ci, le procédé est utilisé dans le simple but de créer une scène de tension, qui certes reste efficace, mais n’a pas la portée de la scène qu’elle imite et est beaucoup plus prévisible.
Et cet exemple est symptomatique du problème majeur du long-métrage : il est bien plus classique et prévisible dans ses effets que son prédécesseur. Carpenter avait créé un film d’horreur étouffant, à l’atmosphère pesante, où la menace de l’ombre Myers était toujours présente malgré la supposée sécurité de la banlieue américaine. Rosenthal, s’il conserve dans son ADN la patte Carpenter, livre un film inégal sur plusieurs points, même si correct dans sa globalité. Quelques traits de génie dans la réalisation (la scène du jacuzzi, le plan de Myers dans le rétroviseur) parsèment le film, mais sont assez rares.

Halloween26.jpg

Mais réduire les problèmes du film à Rosenthal serait hypocrite, et il y a des choses à reprocher à Carpenter, notamment au niveau du scénario et de la musique.
Passons tout de suite sur ses compositions, qui ne sont tout simplement pas au niveau (pour la plupart) de la simplicité de celles du premier opus qui étaient d’une redoutable efficacité. Le scénario, quant à lui, se perd en verbiages inutiles qui réduisent l’intensité du long-métrage. Abandonnant pendant un bon moment Laurie Strode, le film poursuit des sous-scénarios sans peu d’intérêt, se sauvant par le développement intelligent du personnage de Myers.
Et si l’on peut reprocher de nombreuses choses à Rosenthal, il faut admettre que le dernier tiers du film, où Myers poursuit Laurie dans l’hôpital, se hisse très dignement au niveau de ce qu’avait fait Carpenter. Tout ce qui avait fait le sel du premier Halloween y est : l’inéluctabilité de la menace que représente Myers, la mise en scène qui accentue l’angoisse de l’approche de cette menace, la musique qui appuie cette angoisse, les retournements de situation aussi soudains qu’intelligemment construits… Rosenthal s’est semble-t-il surpassé dans ce dernier tiers qui sauve réellement le film. Il y a véritablement compris ce qui avait de Halloween premier du nom un succès, et crée une séquence d’anthologie, à la hauteur de ce qu’on attend d’un Halloween.

blumhouse-halloween.jpg

Et il réussit malgré tout à perpétuer avec panache le mythe Michael Myers, en le rendant encore plus menaçant et invincible. Le tueur masqué use et abuse de toutes sortes d’objets contondants pour assassiner ses victimes, créant ainsi une diversité nécessaire pour éviter la redite de son prédécesseur, et le film crée une relation inattendue entre lui et Laurie qui le rend bien plus profond. Et paradoxalement, dans ce film, Michael Myers devient également la réelle incarnation du Mal dans toute sa splendeur, de la plus pure inhumanité : une menace que rien n’arrête, et qui rivalisera d’ingéniosité pour éliminer ceux qui se trouvent sur le chemin entre lui et Laurie.
Le film est, d’ailleurs, étonnamment plus gore que son prédécesseur (la scène où Michael plante une seringue dans le crâne de sa victime en témoigne), les dommages physiques sont bien plus importants et visibles ; un choix non pas de Rosenthal mais de Carpenter lui-même, qui avait cette volonté de rendre le film plus sanguinolent, allant jusqu’à réaliser de nouvelles séquences pour modifier la première version du film livrée par Rosenthal, au grand dam de celui-ci.

Le film reste donc inégal dans une majeure partie de son déroulement. Mais si reproche il y a à faire, ils se situeront surtout au niveau de la comparaison avec son prédécesseur. Rosenthal n’est pas Carpenter, et a encore moins son talent. Mais il offre un film efficace, certes sans grandes surprises, mais qui fait son office.
Ce film marquera un tournant dans la saga Halloween, puisque le personnage de Michael Myers sera abandonné, selon l’exigence de Carpenter, dans le troisième opus. Mais Halloween II reste au final un opus correct d’une saga qui aura connu bien pire, et le débutant Rosenthal s’en sort avec les honneurs.

 


Note

3/5

N’est pas Carpenter qui veut. Rick Rosenthal crée un film d’horreur efficace mais inégal sur beaucoup d’aspects, malgré un dernier tiers admirable. L’on sent malgré tout l’influence de John Carpenter sur le film, pour le meilleur comme pour le pire. Mais le film reste diablement intéressant, et offre au personnage de Michael Myers le prolongement du mythe et constitue un épisode correct de la prolifique saga Halloween.


Bande-annonce :

Auteur/Autrice

Partager l'article :

Leave a comment