Garde à Vue, huis-clos policier français de 1981, réalisé par Claude Miller, avec Lino Ventura, Michel Serrault et Guy Bertrand




Si le cinéma français est très largement décrié par les gens aujourd’hui (mais on y reviendra prochainement sur le site), il n’en reste pas moins que de nombreuses perles subsistent dans les « archives » de notre patrimoine cinématographique national. Vous l’aurez compris, pour débuter cette série d’articles sur quelques grands films qui va courir jusque la fin de l’été, nous avons choisi l’une de ces petites perles françaises : Garde à Vue, le film de Claude Miller qui avait fait sensation en France en 1981.

Comme vous l’aurez compris, le suspens est mis de côté ici quand à mon avis dessus. Mais en même temps, pouvait-on véritablement douté de la qualité de ce film aux vues de ses qualités sur le papier ? Servi par une mise en scène « lumetesque » de Claude Miller, qui met en abîme sans fioritures les destins de nos personnages. Intelligent sans être tape-à-l’oeil, Miller ne se contente pas modestement de « faire le job ». Il nous offre un ensemble de très grande qualité, terriblement inventif.

Mais, me direz-vous, une bonne mise en scène ne fait pas tout un film. Et à cela, je vous réponds que vous avez parfaitement raison. Car, non seulement la mise en scène de Miller relève de l’excellence, on se doit d’en dire de même à propos du scénario. Car c’est de l’écriture que relève toute le génie du film : Garde à Vue est pensé, écrit et réalisé comme un huis clos. Rien d’incroyable pour l’instant, si ce n’est qu’un huis clos est dur à mettre en place en question de rythme et parfois d’enjeux. Le film évite ses écueils et procède sans précipitation, tout en finesse. Tel le travail de Tarantino sur Les Huit Salopards (QT se serait-il inspiré de Miller ?), l’histoire joue constamment avec le sort de ses personnages, plongé en pleine Saint-Sylvestre dans une affaire de meurtre. Constamment, les personnages veulent sortir du lieu, sortir de l’histoire, plus (pour Serrault) ou moins (pour Ventura) explicitement. Ce jeu constant qui pousse les personnages à converger bien malgré eux au dénouement final (de la même que Tarantino joue avec cette histoire de porte dans la mercerie). Un scénario de haute voltige donc, magnifié par les répliques toujours aussi saignantes de Michel Audiard, comme lui seul sait les écrire. Et la démonstration même qu’un bon scénario est avant tout une histoire d’intelligence d’écriture, car une bonne histoire ne donnera pas forcément un bon scénario, si on ne sait pas l’écrire correctement. Garde à Vue est à l’opposé de cela, et la qualité évidente de son écrit de base serait presque à montrer dans les écoles pour montrer comment dicter un rythme de manière délicate, sans artifices.

Enfin, avant de conclure, je me devais de parler du casting. Et, là encore, on peut être dithyrambique. Que dire de Michel Serrault, et de ce César si mérité, lui électrise littéralement l’écran par une performance juste et poignante. Face à lui, un Lino Ventura incroyable comme d’habitude,  qui signe son dernier tour de piste majeur, et de quelle manière ! En parlant de dernier tour de piste, comment ne pas évoquer la magnétique Romy Schneider dans son avant-dernier film, envoutante et enivrante dans son rôle de femme de Michel Serrault. Avec un nombre limité de scènes dans le film (2/3 scènes seulement), elle arrive à signer ce qui reste peut-être comme la performance la plus marquante du long-métrage. Enfin, comment ne pas signer la performance de Guy Marchand, explosif à souhait, prêt à tout dynamiter sur ce passage.

Vous l’aurez compris, Garde à Vue n’est pas seulement un très bon film, non. Il se situe plutôt dans la catégorie du dessus, celle qui classe les films qui marque la rétine et l’esprit, ces oeuvres puissantes par leurs différentes qualités. Garde à Vue est de cette race-là, et tout amoureux du cinéma français devrait le visionner au moins une fois. Par ce court avis simpliste, j’espère convaincre que le cinéma français regorge de ces petits chef d’oeuvre qui embellissent le patrimoine cinématographique français, et il semble clair et net que Garde à Vue y tient une place d’honneur.

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