Vendu comme un road trip idyllique entre deux adolescents cannibales à travers l’Amérique, le nouveau film de Luca Guadagnigno n’est pas à la hauteur de ce qu’il aurait pu être, et encore moins de ce qu’il prétend être. Le metteur en scène qui s’est fait un nom avec Call Me By Your Name en 2017, revient avec la jeune coqueluche de ces dernières années (révélé par Call Me By Your Name justement) Timothée Chalamet.

Le film Bones and All, suit une jeune adolescente nommée Maren (Taylor Russell) tout juste consciente de ce qu’elle est, et du danger qu’elle représente, qui vient d’être abandonnée par son père et se lance dans un voyage pour retrouver ses racines et avoir des réponses que son tuteur n’a jamais daigné lui donner. Cependant, sur sa route, elle croisera des individus comme elle.

DU CINÉMA DE GENRE TIMIDE

Si on apprécie que de plus en plus de réalisateurs se lancent dans le cinéma de genre, il faudrait aller au bout du sujet, et ne pas simplement contenter le public avec deux, trois scènes un peu sorties de l’ordinaire, parce que c’est bien le problème de Bones and All, jamais vraiment dérangeant, jamais abouti. Aussi bien sur sa pseudo romance qui ressemble plus à deux gamins tout juste entrés dans la puberté, qui essayent de se communiquer timidement leurs sentiments qu’à deux personnes qui pénètrent doucement dans l’âge adulte en vivant avec leurs différences en marge de la société et concrétisent leur attirance. Une romance donc qui ne prend jamais son envol et comme le reste de l’intrigue fait du surplace, au bout d’une grosse heure, on espère toujours que Luca Guadagnigno va vraiment creuser pour amener son film beaucoup plus loin.

Une relation sans étincelles entre Taylor Russell et Timothée Chalamet

DU POTENTIEL SOUS EXPLOITÉ

Un road trip très au ralenti ponctué par quelques scènes un peu trash mais pas assez bien filmées (parfois même du hors-champ) pour qu’on puisse vraiment se sentir impliqués avec nos deux jeunes héros, on n’a plus qu’à se contenter des apparitions inutiles de Mark Rylance pour semer un peu le trouble sur le chemin de Maren. Des apparitions qui font beaucoup de remplissage pour combler un script qui manque de ressorts bien souvent, même si l’idée de « ils sont plusieurs » est intéressante et indique une espèce en marge de la société, c’est balancé de façon abrupte sans trouver ni fondation ni conclusion solide. Ce qui est fortement décevant vu que ça aurait pu être le point fondamental de l’intrigue.

UNE ROMANCE SANS ÉTINCELLES

Bones And All peine beaucoup dans sa démarche de raconter une histoire d’amour entre deux adolescents cannibales, ou même à parler de cannibalisme, et c’est sans compter sur les banales sous-intrigues familiales qui ne sont que prétexte pour les développer un tant soit peu. Cependant tout ça lorgne dans une monotonie qui s’installe dès le début, et excepté un moment tendre au grand air , qui ferait presque penser à du Terrence Malik entre Taylor Russell et Timothée Chalamet, où ce dernier communique de vagues émotions, rien ne sort le film de sa platitude.

La coqueluche casse son image dans "Bones And All"

UN FILM INFLUENCÉ MAIS PAS À LA HAUTEUR

On note que Luca Guadagnigno est inspiré par le style Julia Ducourneau et notamment avec le très notable « Grave » qui rentrait lui pleinement dans le sujet, sans divagations inutiles. Bien entendu le metteur en scène qui s’était déjà essayé à l’horreur en remakant le « Suspiria » du maître Argento, n’a pas la maîtrise de la réalisatrice du très troublant Titane, pour se prêter à l’exercice. Et si on pouvait un minimum penser que parler à nouveau de puberté et pulsions (sexuelles ou organiques) serait une facilité pour Guadagnigno, après l’avoir traité plus ou moins frontalement dans « Call Me By Your Name » en dirigeant Chalamet, là aussi, c’est très laborieux, on ressent si peu d’alchimie entre Maren et Lee qu’il devient très compliqué de trouver à quoi se raccrocher.

Bones and All souffre de ne pas assez approfondir son sujet si ce n’est qu’en surface, et d’une relation qui manque cruellement de vie et de charme. Tout cela est sûrement dû à un réalisateur qui manque de compétences pour donner corps et âme à son histoire, et à un acting très moyen, à part Mark Rylance qui déstabilise chaque minute où il est à l’écran, Taylor Russell et Timothée Chalamet ne véhiculent que peu de sensations.

Chalamet continue de grimper en notoriété, et joue ici un rôle à contre emploi de son image de play-boy, en vagabond viril avec quelques cheveux roux, mais cela ne suffit pas à tenir la vedette d’un drame nomadien qui se veut trash aux bords romanesque, mais n’est rien d’autre qu’un drame auquel il manque plein d’outils pour être vraiment construit et vivant. Un film froid sans émotions ni texture.

Le film est à découvrir ce Mercredi en salles.

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