? Réalisateur : Alex Garland (Ex Machina)

? Casting : Nathalie Portman (Black Swan, Léon, V pour Vendetta…), Jennifer Jason Leigh (Les Huit Salopards), Oscar Isaac (Inside Llewyn Davis, Star Wars VIII & IX, Ex Machina), Gina Rodriguez

? Genre : science-fiction

? Pays : Etats-Unis

? Sortie : 24 juillet 1981 (Etats-Unis), 17 février 1982 (France)

Synopsis : Lena, biologiste et ancienne militaire, participe à une mission destinée à comprendre ce qui est arrivé à son mari dans une zone où un mystérieux et sinistre phénomène se propage le long des côtes américaines. Une fois sur place, les membres de l’expédition découvrent que paysages et créatures ont subi des mutations, et malgré la beauté des lieux, le danger règne et menace leur vie, mais aussi leur intégrité mentale.

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4 ans après Ex Machina, qui avait fait souffler un vent de fraîcheur sur l’univers de la science-fiction actuelle, Alex Garland revient avec un nouveau long-métrage qui cette fois-ci sort uniquement sur la plateforme de streaming Netflix (avec une distribution limitée en salles américaines). Un film qui annonçait un univers visuel plutôt intéressant, et qui donc était attendu, surtout au vu du succès critique du précédent film de son cinéaste. Maintenant qu’il est sorti, il est temps d’en juger !

annihilation

« Je ne sais pas ». Tel est le mantra d’Annihilation qui, tout autant que son spectateur, laisse ses personnages dans l’incompréhension.
Lena (Natalie Portman), biologiste, part en expédition avec quatre de ses collègues scientifiques dans le « Shimmer », une catastrophe écologique qui s’étend de plus en plus et qui pourrait annihiler (du moins, le pense-t-on) l’humanité. Un périple au cours duquel elle va expérimenter la nature profonde de la psyché humaine.

De la part du réalisateur d’Ex Machina, on pouvait s’attendre à beaucoup de choses, mais certainement pas à ça.
Convoquant les fantômes de Stalker et de 2001, l’Odyssée de l’espace, Alex Garland amène son long-métrage vers un trip halluciné inédit et qui fait souffler sur la science-fiction actuelle un nouveau vent de fraîcheur, ce qui couplé avec son précédent film, le place désormais comme une valeur sûre de la science-fiction actuelle.
Ce Shimmer donc, ce paradis perdu que n’aurait pas renié Tarkovski, cet espace hors de toute vraisemblance humaine (tout y est diffracté, et pas seulement la lumière, qui crée ces superbes visuels semblables à des arcs-en-ciel, ou les ondes radio…) est une odyssée psychédélique pour des personnages auto-destructeurs qui se frayent un chemin dans une nature qui a repris ses droits. Car c’est bien ce dont il s’agit ici, d’auto-destruction : l’alcoolisme, le tabagisme, la perte d’un proche, les protagonistes de ce film possèdent, comme le dit Lena, ce comportement auto-destructeur qui se manifeste encore plus face à l’inconnu.

Mais ceci n’est qu’une interprétation parmi toutes celles que possèdent le film, et celle-ci ne doit pas être considérée comme l’unique et seule vérité : Alex Garland livre ici un puzzle où les spectateurs se posant des questions sauront y trouver des éléments de réponses. Et c’est là toute la maestria d’un réalisateur qui déjà dans Ex Machina questionnait de manière remarquable la robotique et l’intelligence artificielle : Annihilation, patchwork de thèmes, de visuels et d’interrogations, n’est jamais pour le spectateur un trip halluciné complètement rédhibitoire. Comme Mother! avant lui, c’est un film radical, mais qui offre de multiples clés de lecture que les spectateurs pourront saisir à leur guise, en faisant un film densément riche. Le film n’est pas exempt de défauts (les effets visuels sont parfois trop visibles, et certaines parties de ce puzzle auraient pu être retirées), mais il est globalement une réussite.

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Alex Garland réussit ici un tour de force visuel, avec l’exploit de créer un environnement naturel inhabituel dans le paysage cinématographique actuel. Cette jungle, peuplée par des animaux aux attributs inédits (l’ours est une merveille d’écriture), est un lieu de tous les dangers pour nos scientifiques, mais qui se drape aussi d’une certaine poésie, comme la vision d’un monde miroir du nôtre (« Shimmer » étant l’équivalent de « Miroitement »), miroir non déformant et qui en montre de manière brute les aspects les plus sombres. Dans cette bulle hors du temps (lui aussi diffracté et étiré), Lena saisit tous les vices de l’âme humaine, qui emmène son hôte à sa perte. D’hôte, il en est question dans Annihilation, amenant alors à cette question (parmi les nombreuses du film) : est-ce une régression ou une évolution ?
Ce Shimmer, ce paradis perdu, c’est aussi l’expression du cynisme d’un cinéaste obnubilé par la psyché humaine et qui exprime alors toute la vacuité d’un monde qui court à sa perte et qui, paradoxalement, considère le Shimmer comme la principale menace de celui-ci.

La sortie du film sur Netflix est une totale hérésie. Voilà un grand film de science-fiction, un grand voyage, qui aurait mérité sa place dans les salles obscures. Mais nul doute que la maestria d’Annihilation, ses nombreuses clés de lecture, donneront au film la réputation qu’il mérité et feront regretter aux producteurs leur frilosité.

Note 

8/10

Avec Annihilation, trip psychédélique qui interroge sur l’humanité et ses limites, Alex Garland s’impose définitivement comme un des cinéastes majeurs de la science-fiction du XXIème siècle. La sortie uniquement sur Netflix fera grincer des dents, mais qu’importe : le film est d’une richesse thématique et visuelle telle que le temps lui fera justice.

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