Un jour dans la vie de Billy Lynn, film dramatique américano-britannico-chinois réalisé par Ang Lee avec Joe Alwyn, Kristen Stewart, Garrett Hedlund, Steve Martin…..

Nouveau film d’Ang Lee, grand amateur d’innovations technologiques (il avait par exemple réalisé L’Odyssée de Pi), Un jour dans la vie de Billy Lynn a fait son petit effet en raison de ses techniques d’image totalement inédites. Filmé en 4K HFR à 120 images par seconde, le film s’annonçait comme une véritable révolution de l’image numérique, modifiant de manière importante le rapport du spectateur au film. Malheureusement, seuls quelques chanceux auront eu la chance de pouvoir visionner le film dans une qualité similaire (et couvrant de louanges le visuel du film), car la grande partie des salles de cinéma actuelles n’est pas équipée pour ce type de technologie. Mais le film n’est-il donc qu’un tour de force technique annoncé, ou recèle-t-il d’autres qualités ? Verdict maintenant !

Le film suit l’histoire de William Lynn, jeune soldat de l’armée américaine récompensé pour acte d’héroïsme lors d’une mission particulièrement dangereuse, en compagnie des membres de son escouade, pendant la guerre d’Irak. Le film les suit pendant une journée à Dallas pendant leur rapatriement, où leurs actes d’héroïsme seront célébrés.

Prenant donc place pendant la guerre d’Irak, le film évite de peu un manichéisme dérangeant et tente de rester le plus objectif possible. Toute la question du film est de montrer les conséquences de la guerre sur les troupes, et plus particulièrement sur Billy (qui, par un travail ingénieux de mise en scène, est toujours considéré seul alors que ses coéquipiers sont toujours filmés en tant que groupes), que l’on soupçonne (sa sœur en particulier, interprétée par Kristen Stewart) d’être atteint d’un syndrome post-traumatique ; tous les flashbacks du film ne sont que la réminiscence de visions du personnage, qui par le bruit des feux d’artifice par exemple se voit rappeler le souvenir de la tonitruante guerre auquel il prend part. Le montage, très intelligent, permet donc de montrer les sévices pour l’esprit d’une telle guerre de laquelle on ne part vraiment jamais.

On n’en part jamais, mais on n’est pas réellement à sa place autre part. Le film montre à quel point l’armée peut enfermer ces jeunes dans un système cadré, une bulle hors du monde réel duquel il est difficile pour eux de sortir. Ils ne passent le film qu’avec des gens qui ne comprennent pas (et ne peuvent comprendre) ce qu’ils ont pu ressentir, ou pire, avec des gens qui cherchent à profiter de ces histoires (notamment par le personnage de Chris Tucker), dans une logique financière implacable et qui se soucient peu de leur avis ou préoccupations. Billy se détache du groupe de par son détachement à toute la célébrité nouvelle qui s’impose à eux : il ne peut jamais réellement oublier cette guerre, et toutes des célébrations le mettent plus mal à l’aise qu’autre chose. Joe Alwyn, qui incarne Billy, est donc excellent dans ce rôle, parvenant à merveille à faire ressentir au spectateur sa différence, sa sensation d’isolement eu égard au groupe. Le reste du casting joue plutôt bien son rôle, même s’ils sont effectivement en retrait par rapport à Billy.

Mais toute l’ironie de la situation est que cette guerre fonctionne, comme je l’ai dit, comme un cadre protecteur pour lui. La question qui traverse tout le film est notamment pour Billy de savoir s’il doit y renoncer. Mais l’armée, ses règles, ses coéquipiers, tout cela fonctionne comme une mini-société qui peut servir pour les jeunes un peu perdus (comme Billy, ancien petit délinquant qui est maintenant le pilier de sa famille) à se trouver un but à leur existence. Et c’est là le problème que posent souvent les films de ce genre : en prenant part à cette guerre, les soldats ne sont plus à leur place nulle part, traumatisés par la guerre mais réfractaires à la quitter de par le cadre rassurant qu’elle impose. A l’instar d’un Clint Eastwood, Ang Lee utilise un événement au retentissement national mais à l’air pourtant anecdotique pour montrer comment la société façonne ses héros, de manière assez floue d’ailleurs alors que cette notion a façonné l’histoire des Etats-Unis, parfois contre le gré des protagonistes eux-mêmes.

Le film pose donc toutes ces questions intéressantes, et bien d’autres, que posent la plupart des films de ce genre, au travers d’un visuel magnifique, qui fait regretter de ne pas pouvoir voir le film dans ses conditions de tournage avant plusieurs années. Ang Lee dispose clairement d’un talent de composition évident, magnifiant ses plans par une symétrie des plus agréables. Toute la séquence de la mi-temps du match est incroyable, arborant un patchwork de couleurs, de visuels et de son qui vous font irrémédiablement rentrer dans l’ambiance de ce film. Mais le film ne se presse jamais, les plans sont souvent très posés pour pouvoir profiter de la qualité de composition d’Ang Lee. Les scènes de combat en Irak n’ont pas à rougir d’une possible comparaison, elles semblent très réalistes et gardent le souci du détail, rappelant par là un certain Full Metal Jacket. Le travail sur le son et son mixage rappellent de par sa qualité le récent Hacksaw Ridge, plongeant le spectateur dans la violence auditive de cet affrontement.

Ang Lee signe donc ici un film sur la guerre au visuel impressionnant et à l’histoire qui, si les questions qu’elle aborde sont loin d’être originales, restent d’une grande efficacité et fonctionnent parfaitement. Visuellement, c’est sûrement l’un des films les mieux travaillés de ce début d’année, tant le talent de composition du réalisateur coréen fait mouche. Une petite merveille de ce début d’année que je vous conseille !

Note : 8/10

Moyenne IMDb : 6,4/10

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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