Marie Stuart, reine d’Ecosse, film historique de 2019 réalisé par Josie Rourke avec Margot Robbie, Saoirse Ronan, Joe Alwyn, David Tennant…


Synopsis :
À seulement 18 ans, Marie Stuart, est déjà veuve, après le décès de son époux le Roi de France, François II. Elle refuse de se remarier conformément à la tradition. En 1561, elle quitte donc la France pour rejoindre ses terres natales d’Écosse pour réclamer le trône qui lui revient de droit. Mais la reine d’Angleterre, Élisabeth
Ire, n’est pas de cet avis. Elles vont toutes deux devenir de véritables sœurs ennemies, malgré une fascination réciproque.

Dans le grand combat des films historiques de ce début d’année 2019, Marie Stuart, reine d’Ecosse faisait pâle figure face à Yorgos Lanthimos et sa Favorite encensée par la critique et multi-nominée aux Oscars (malheureusement pas multi-récompensée). Film en costumes dans l’Angleterre du XVIeme siècle, le film s’était paré d’un casting alléchant et, dans la position du petit poucet, semblait pouvoir créer la surprise.

Et quelle ne fut pas notre déception !

La reine Elizabeth (Margot Robbie)

Le féminisme, et on ne saurait le fustiger, semble se faire une place dans nos salles obscures en ce début d’année. Après les jeux de pouvoir teintées de cynisme entre la reine et ses deux favorites dans La Favorite, place à Marie Stuart, reine d’Ecosse, souveraine au destin tragique que John Ford et Katharine Hepburn avaient déja dépeints en 1936 et qui prend ici les traits de Saiorse Ronan.
Dans le politique du XVIeme siècle entre l’Angleterre protestante et l’Ecosse catholique, dans un monde dominé par les hommes, se distinguent deux femmes de pouvoir au tempérament bien trempé : la reine Elizabeth (Margot Robbie), condamnée à l’infertilité, et sa cousine Marie Stuart, veuve qui souhaite reprendre son destin en main. Mais loin de se contenter d’un affrontement politico-idéologique entre ses deux souveraines, Josie Rourke va apporter à son long-métrage une touche de modernisme : en montrant deux femmes non plus ennemies mais alliées dans une défiance commune envers une cour exclusivement masculine, elle tend à rendre un récit un peu moins manichéen que prévu et à offrir une vision que les historiens rejetteront sûrement mais qui aura le mérite de créer une nouvelle et bienvenue vision de l’Histoire.

La reine d’Ecosse Marie Stuart (Saoirse Ronan)

Mais il n’est pas tout de se draper des glorieux apparats du féminisme pour créer une oeuvre réussie et cohérente. Auparavant directrice artistique du Donmar Warehouse (poste déjà occupé dans les années 90 par Sam Mendes, à l’oeuvre sur plusieurs opus de la saga James Bond au cinéma), Josie Rourke s’est ainsi lancé dans le pari osé d’une première réalisation. Osé, mais guère concluant…
Car si l’on peut saluer le sens du détail dans les créations des costumes et des décors (pure logique de la part d’une directrice artistique d’un théâtre), la mise en scène de la réalisatrice souffre d’un manque criant d’ambition et de sens du grandiose pour réussir à emphaser des décors qui ne demandent qu’à déborder du cadre. Si les scènes en extérieur sont l’occcasion de laisser enfin respirer celui-ci, Josie Rourke pêche, sans doute par excès de modestie, à donner à ses environnements intérieurs une vraie portée lyrique et dramaturgique ; à regret tant elle aurait permis à ses deux actrices principales, Margot Robbie et Saoirse Ronan, d’exprimer un peu plus leurs capacités dramatiques. Cette réalisation, assez quelconque, nuit à l’intérêt d’un spectateur que les quelques scènes visuellement réussies ne suffisent pas à garder captif.
Car si le film est conscient d’une chose, c’est du potentiel de ses interprètes. Un potentiel cependant assez mal exploité, la faute à un récit bancal qui la rend caricaturale pour Ronan, et un manque de temps d’écran pour Robbie. Un regret tant la séquence qui les rassemble est de loin la plus réussie du film et prouve que ces deux écrins ne demandaient qu’à exprimer leur talent.

La reine Elizabeth (Margot Robbie)

Là où le film va réellement se désagréger, c’est dans son récit et le développement émotionnel et spirituel de ses personnages.
Tout d’abord, la reine Mary Stuart : elle est la principale protagoniste du film (au point d’en faire parfois oublier la reine Elizabeth), mais la manière dont Rourke veut en faire une femme forte et décidée est fortement ratée ; on a plus l’impression d’être face à une petite effrontée qui n’écoute qu’elle plutôt qu’à une reine pragmatique mais qui sait garder un cap et faire preuve d’une autorité justifiée. Ainsi, difficile d’avoir une quelconque attache émotionnelle pour elle, d’autant plus que Saoirse Ronan, visiblement peu ou pas dirigée, ne sait pas trop sur quel pied penser.
On eut pu penser que le film se sauverait par la présence forte de Margot Robbie : c’était sans compter sur un montage qui, en plus d’être répétitif dans certaines de ses séquences voire carrément hasardeux dans d’autres, ne lui offre que très peu de temps d’écran pour qu’elle puisse exprimer son potentiel, qu’on sait immense. Les quelques scènes qui la mettent en valeur, si elles sont réussies, ne parviennent pas à installer une véritable assise émotionnelle pour ce personnage.
Et fatalement, lorsqu’on se retrouve avec deux personnages principaux féminins pas assez bien traités pour y développer un attachement émotionnel, le film pâtit d’un manque de puissance dramatique et d’une véritable émotion pour le spectateur, que leur scène commune vient nuancer mais qui n’est pas suffisant pour sauver les meubles.
Et ce n’est pas mieux pour des personnages secondaires bringuebalées par les aléas d’un récit tortueux qui n’arrive jamais à les développer correctement et s’en sert comme d’une roue de secours nécessaire pour faire avancer le récit.

La reine d’Ecosse Marie Stuart (Saoirse Ronan)

De Marie Stuart, reine d’Ecosse, on retire un récit pataud, dont le dernier quart d’heure larmoyant au possible n’a pas l’impact émotionnel préalable nécessaire, et une histoire qui aurait gagnée à diluer la fonction sujet pour véritablement emphaser un message féministe qui aurait pu être fort, mais qui se saborde et semble aller à contre-courant de son intention de base.
Visuellement réussi mais manquant d’ambition, le film de Josie Rourke souffrira, bien malheureusement, de la comparaison avec La Favorite, bien plus clair et réussi dans ses intentions.

Note

2,25/5

Loin d’y mettre de la mauvaise volonté, Josie Rourke pêche fatalement de par son inexpérience cinématographique et peine à offrir un récit captivant que les deux actrices qui le composent ont bien du mal à faire briller. En rapport à La Favorite, c’est très mauvais. En tant que tel, c’est une déception.

Bande-annonce

Trailer de Mary, Queen of Scots




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