On en parle depuis 2021, ce fameux film en stop-motion aura pris à son auteur Phill Tippett plus de 30 ans à produire et réaliser. On en a (presque) tous entendu parler et malgré une future présence sur Shadowz et une distribution physique chez Carlotta, sa présence au cinéma est quasiment inexistante.

La tentative de critique qui suit est pour tous ceux qui hésitent à y jeter un œil, histoire que ceux-là sachent dans quoi ils s’embarquent !

Vos cauchemars ont peur de ce film

Phil Tippett est connu pour avoir aidé à révolutionner les effets spéciaux pratiques plusieurs fois, notamment sur Star Wars ou Starship Trooper, distingué d’un oscar pour son travail émérite. Mais en tant qu’auteur d’un long-métrage, c’est un univers bien à lui qu’il décide d’exposer au monde.

La promesse de base est tenue, à savoir de servir un semi-récit séquencé en toutes sortes d’images d’horreur, entre gore et macabre, où les fluides de toutes sortes viennent éclabousser l’écran. Il faut savoir que le film est à la fois tourné sur pellicule et en numérique, ce qui pousse le réalisateur à équilibrer son esthétique. Ce qu’il fait donc, en explosant totalement la condition même de ses images : on pourrait croire qu’il se laisse porter par le hasard du chaos qu’il génère, mais on ressent une immense maîtrise du montage et de la tonalité, qui fait que ce joyeux bordel tient sur ses deux pattes.

Mad God 1

Galerie furieuse

Tippett fait écho à une multitude d’autres films qui traitent eux aussi de la déchéance de l’humanité (sans pour autant qu’ils aillent à ne serait-ce qu’un pourcent de ce que lui tente sur l’aspect « déchéance »). On retrouve donc des plans de Metropolis par exemple, une aura de la Planète Sauvage à la sauce Evil Dead, le tout porté par un final pas si loin d’un Terrence Malik ou même du jeu vidéo Outer Wilds.

Qu’on prenne ce trip sous acide comme une idiotie punk qui part dans tous les sens est concevable, mais ce résidu pulp possède de véritables forces qui feront de lui, en toute honnêteté, un futur classique. Déjà, on y prend ce que l’on souhaite. Ce film est un service, où l’on pioche ici et là le moment qu’on aime. Et pour peu qu’on en soit friand, l’horreur y est une extase. Dans ses références, ses influences, ses sous-genres, ce monde-ci est à explorer au moins une fois dans sa vie. Bizarre et malveillant, Mad God n’est pourtant jamais idiot ou méchant, toujours force de proposition.

Mad God 2

l'apport du stop-motion

Il est très intéressant de constater que plusieurs types de médias se confrontent et se complètent dans Mad God. Certaines prises de vues réelles que je ne spoilerai pas fournissent en soi une plus-value inattendue. Mais c’est évidemment le stop-motion qui en est la star, tantôt baveuse et brillante sur pellicule, tantôt sèche et colorée en numérique. L’animation est elle aussi très changeante. Un moment, elle est parfaitement exécutée, l’autre, on se demande si ce n’est pas le stagiaire qui a foiré. Le film est souvent inégal dans ses qualités, mais elles restent malgré tout des qualités. Ces fluctuations participent activement au film et s’ancrent dans la même démarche, celle de construire une déconstruction.

C’est le propos du film, la fin de tout, sa folie. L’horreur sous-jacente qui fait renaître le monde, polluée littéralement par des infirmes et malchanceux en souffrance.

Mad God 3

On a l’impression de voir un classique des années 80, vraiment. En tout cas, il l’est déjà dans nos cœurs ! Hymne punk à la destruction de tout, Mad God est un film parfois magnifique qui hyperventile jusqu’à en être éprouvant, ce qui est un atout. Rares sont les films qui jouissent du début jusqu’à la toute fin.

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