Paths of Glory est le troisième long-métrage de Stanley Kubrick. Il sort en 1957 sur les écrans américains mais bien plus tard dans les salles obscures françaises…
Le contexte
Paths of Glory (Les Sentiers de la gloire en français) est la retranscription de plusieurs faits qui se sont déroulés durant la première guerre mondiale. En effet, plusieurs centaines de soldats ont été exécutés par les dits « conseils de guerre » pour des faits similaires à ceux du film.
Le film sort en Allemagne en 1957 mais fait l’objet de polémiques et scandales en France et en Belgique. En pleine guerre d’Algérie, l’Etat français insiste pour que le film ne soit diffusé ni en France, ni en Belgique. Néanmoins, nombreux journalistes français font le déplacement lors de l’avant première à Bruxelles. L’ampleur du scandale grandissante, les producteurs américains décident de ne pas demander de visa pour distribuer le film dans l’hexagone. Le film sera alors aussi censuré en Suisse. En réponse à l’affaire, Stanley Kubrick en personne écrira une lettre pour l’hebdomadaire français L’Express en mars 1959. Il « se défend d’avoir voulu critiquer directement la France et ses soldats, insistant sur le fait que son scénario aurait pu avoir pour cadre n’importe quelle guerre ». Le film ne sortira en France qu’en 1975, soit 17 ans après la sortie américaine…
Le film
Paths of Glory met en scène une histoire profondément injuste, portée par un Kirk Douglas d’une très grande justesse autant dans son jeu que dans la construction de son personnage.
Suite à une prise de décision hasardeuse de deux généraux, une division se voit ordonner d’attaquer la cote 110, une position allemande impossible à conquérir. La mission est dès le départ impossible. Kubrick essaie presque de le faire dire aux deux décisionnaires. La mission échoue, les pertes sont nombreuses, les troupes se replient et de nombreux soldats refusent de partir au front. Les deux généraux décident alors de faire payer aux soldats leur « manque de courage ». Trois hommes, au hasard, sont condamnés à mort pour avoir déserté le champ de bataille.
Kirk Douglas, alias le colonel Dax
Probablement de par son grade hiérarchique, le personnage de Kirk Douglas, le colonel Dax, est l’un des seuls à émettre des avis censés. Il va à contre-courant de la pensée militariste menée par tous les personnages du film. Dans une quête désespérée, il tente de sauver ses hommes d’une mort qu’ils ne méritent pas. Sa prestation est éblouissante. La justesse dans son jeu d’acteur et dans sa manière d’occuper l’écran sont époustouflantes. Certes, Kirk Douglas n’en est pas à son premier film (il a en effet déjà joué dans de grands films à succès Vingt Mille Lieues sous les mers, La Vie passionnée de Vincent van Gogh…) mais le rôle offert par Kubrick est un rôle sur mesure.
Le film met en avant cet homme, qui malgré son statut, préfère défendre des valeurs justes. En effet, il aurait pu acquiescer les décisions de ses supérieurs sans se mettre dans une position délicate. Le colonel Dax n’hésite pas à confronter frontalement sa hiérarchie et ses absurdités notamment lors du conseil de guerre organisé pour juger les trois soldats. Dans cette scène profondément injuste, l’armée ne juge pas, elle condamne avant le début du procès.
Le travelling
L’apogée du film réside dans un travelling parfaitement maitrisé. Kubrick met en scène le protagoniste du film dans une scène prenante et glaçante. Le colonel Dax armé d’un sifflet et d’un pistolet, sortant des tranchées, mène ses soldats sur un no man’s land qui prend toute son inhumanité et sa monstruosité en noir et blanc. Cette scène est d’autant plus angoissante à regarder car le spectateur connait déjà la finalité de l’attaque tant elle est présentée comme absurde par le réalisateur.
Seuls les bruits des armes et du sifflet du colonel Dax retentissent durant près de trois minutes. Les bombes pleuvent, les corps tombent, et le bruit de ce sifflet retentit comme un cri de désespoir sur une bataille déjà perdue. Kubrick ne fait pas un film qui traite de la guerre, Kubrick filme la guerre. Le spectateur est immergé dans la bataille, tel un soldat du colonel Dax.
Création d’un mythe
Malgré trois films réalisés, Paths of Glory s’inscrit comme le premier grand film de Stanley Kubrick et probablement comme son premier chef-d’œuvre. Ce film qui fait énormément de remous à l’intérieur et à l’extérieur des salles, participe à la naissance du mythe kubrickien, participe à la naissance de l’aura de Kubrick. Avec Paths of Glory, Kubrick ne fait pas un énième film sur la guerre, il révolutionne le genre en la documentarisant.
Pour terminer, Pelliculte vous présente le travail de Joel Walden qui résume la filmographie de Stanley Kubrick en 4 minutes, avec, bien évidemment, des images de Paths of Glory mais pas que…
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