Il y a quelque chose d’excitant à l’idée de voir un premier film, mais aussi quelque chose qui suscite l’appréhension. Car il s’agit à chaque fois de la promesse de peut-être voir la naissance d’un nouveau talent… ou d’un possible nouveau tâcheron.

Et ici, nous allons donc voir ce qu’il en retourne de Swing Rendez-vous, le premier film de Gerome Barry. Travaillant anciennement dans une boîte de production, c’est un voyage d’un mois dans le monde des clubs swing de New York qui l’inspire pour réaliser ce long-métrage dans lequel il endosse plusieurs casquettes. Réalisateur et scénariste, il est également acteur principal. En effet, il campe le personnage de Théodore, un parisien trentenaire frustré et timide. Il a du mal à faire le deuil de sa dernière rupture d’il y a six mois. Jusqu’au jour où, en se promenant avec ses amis dans la capitale, il aperçoit une jolie femme faisant son jogging. Un jour, pour sa mère, il achète aux Quais de Seine un recueil de morceaux de jazz. Une page a été arrachée, celle contenant la partition de Sound of Love. On dit que cette chanson est capable de rendre n’importe qui amoureux… Ainsi, Théodore s’envole pour New York où vivrait la précédente propriétaire du livre…

Gerome Barry dans le film Swing Rendez-vous (Gerome Barry, 2023)
Gerome Barry dans le film Swing Rendez-vous (Gerome Barry, 2023)

ENTRE CONTE, COMÉDIE BURLESQUE AUX RÉFÉRENCES MULTIPLES ET ASPECT DOCUMENTAIRE

Dès le début, Swing Rendez-vous assume son aspect conte. C’est grâce à sa réalisation que Gerome Barry parvient à donner à son histoire un charmant aspect hors du temps, à la fois candide et raffiné. Par exemple, nous avons un narrateur américain dont la (belle) voix guide l’entièreté du film. Mais nous retrouvons également l’utilisation d’un filtre jaune, des transitions en animation stop-motion, un flash-back fort touchant filmé avec une caméra pellicule 35mm Lomokino… Ajoutons à cela des compostions jazzys vraiment réussies, signées Giovanni Mirabassi et qui viennent sublimer le tout.

Cet aspect conte passe également par des personnages volontairement archétypés. À commencer par Théodore, notre héros, qui séduit par sa naïveté. Ses manières ne sont pas sans évoquer l’époque des comédies burlesques muettes et ses névroses rappellent instantanément celles des personnages de Woody Allen.

Car en effet, nous pouvons remarquer à quel point Gerome Barry tire ses inspirations de nombreux films, sans jamais tomber dans l’imitation. Nous avons évoqué les comédies burlesques de l’époque du muet et Allen, mais évoquons également Emmanuel Mouret, visiblement une source d’inspiration pour les dialogues.

Le film dévoile également, une fois à New York, une partie presque documentaire. L’on s’embarque dans de véritables clubs new-yorkais, dans lesquels se balade une belle bande de musiciens de swing (qui le sont également dans la vraie vie). On y retrouve la chanteuse Tatiana Eva-Marie dans le rôle de Maria et qui est tout simplement flamboyante. Son personnage dégage un véritable charisme, notamment quand elle interprète de superbes chansons. On serait même tenté de dire qu’elle vole la vedette à Gerome Barry !

Cette partie possède donc également une certaine magie et le héros préserve son côté burlesque. Mais on ressent un aspect plus terre-à-terre, notamment dans les interactions entre les musiciens, qui sont plus réalistes. Le rythme ralentit et une certaine mélancolie, une certaine gravité s’imposent désormais…

Tatiana Eva-Marie dans le film Swing Rendez-vous (Gerome Barry, 2023)
Tatiana Eva-Marie dans le film Swing Rendez-vous (Gerome Barry, 2023)

JE VOUS TROUVE UN CHARME FOU…

Swing Rendez-vous a donc de belles qualités, mais n’est pas pour autant un film parfait. On peut noter quelques défauts formels (comme des doublures visibles lors d’une scène de danse). Mais on peut surtout lui reprocher la finalité prévisible de son scénario, bien que le cheminement soit fort plaisant.

Car en effet, suivre Théodore dans son aventure s’avère un vrai petit plaisir. De sa quête se dégage un véritable charme donnant lieu à un film pétillant comme du champagne ou du Lambrusco. On est vraiment enchanté par cette ambiance jazzy new-yorkaise et par toute cette galerie de personnages instantanément charismatiques (et ce, même s’ils ont un rôle secondaire voire tertiaire). Si nous avons parlé de Tatiana Eva-Marie, nous n’avons pas parlé de Arielle Dombasle ou de Esteban. L’ancienne égérie de Eric Rohmer séduit le temps d’une scène où elle explique à Théodore le pouvoir de Sound of Love. Le second, dans le rôle de Rémi, ami de Théodore, est vraiment le personnage comique du film, par sa nonchalance caractérisée par sa voix si particulière. Notons enfin un sublime caméo de Bernard Pivot dans le rôle d’un vendeur de livres, et où il fait preuve d’une certaine auto-dérision !

Au final, Gerome Barry propose un fort sympathique et chaleureux premier long-métrage qui a su accomplir quelque chose d’important. À savoir, proposer quelque chose de suffisamment bon pour que l’on ait envie de voir ce qu’il pourrait proposer par la suite. À condition qu’il persévère dans la réalisation, bien sûr !

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