Ce mercredi 17 mai, tous les projecteurs étaient rivés sur le réalisateur espagnol Pedro Almodóvar. Cet habitué de la Croisette a créé la surprise en présentant Strange Way of Life, un western queer et moderne d’une durée de 31 minutes.
14h30. Au pied des marches du Théâtre Claude Debussy, une forêt de parapluie empêche d’évaluer le nombre de fans qui se bousculent. Peut-être sont-ils plus d’une centaine à lutter contre le déluge cannois. Tous espèrent s’introduire dans la salle où un certain Pedro Almodóvar présentera son court-métrage très attendu, avant de donner une masterclass dans le cadre d’une séance unique.
L’attente s’achève enfin lorsque Thierry Fremaux fait une entrée fracassante devant une salle pleine à craquer. Relevé de sa chute, le délégué général du Festival de Cannes annonce le casting de Strange Way of Life. Manu Ríos, José Condessa, Jason Fernandez et Ethan Hawke débarquent sous les acclamations d’un public toutefois frustré de constater l’absence de Pedro Pascal. En effet, celui qui interprète sensuellement le partenaire du personnage de Ethan Hawke est actuellement accaparé par le tournage de Gladiator 2 de Ridley Scott. Pourtant, le pétillant Pedro Almodovar balaye aussitôt l’amertume dès son apparition dans la salle. « Je suis heureux que vous soyez là malgré la pluie » se réjouissait-il face à ses spectateurs, parmi lesquels se cachaient Rossy de Palma, Xavier Dolan et Catherine Deneuve.
Une réponse à Brokeback Mountain ?
Plusieurs fois primé à Cannes, le cinéaste espagnol a fait halte à la Croisette pour présenter un film d’une demi-heure, à l’occasion d’une séance unique. Quelques années après avoir refusé de réaliser Le Secret de Brokeback Mountain, il crée cette année la surprise en dévoilant ce western moderne queer. Tourné en anglais, cet objet sensuel et intriguant raconte les retrouvailles de deux cow-boys dans le grand ouest américain, intimement liés par un amour de jeunesse. Une passion que l’un assume et l’autre rejette. « Il s’agit d’une discussion de deux amants dont les réactions à cette nuit d’orgie s’opposent. Celles-ci ont été très bien comprises par les acteurs (Pedro Pascal et Ethan Hawke) qui les incarnent justement » raconte le réalisateur. Si Strange Way of Life est modernisé par son propos assumé, il l’est aussi à travers le recyclage du western. S’adonnant à une réflexion sur le genre, Pedro Almodóvar a surtout cherché à faire « un western à sa façon » plutôt qu’un « western spaghetti », selon ses mots.
Un western en marge de Hollywood
À la fin du XIXe et au début du XXe siècle, les hommes ne s’autorisaient aucune extravagance en terme de mode. Dans les westerns, les shérifs étaient toujours élégants, la seule extravagance qu’ils s’autorisaient était de porter un gilet en soie sombre. Pour Pedro Almodóvar, « cela manquait de couleur ». Pour enluminer les costumes de ses personnages sans paraître anachronique, le cinéaste espagnol a notamment confié qu’il s’était inspiré de James Stewart dans Les Affameurs d’Anthony Mann, un western des années 50. Il ose ainsi le pas de côté en habillant le personnage de Silva, interprété par Pedro Pascal, d’un blouson vert tape-à-l’œil. Produit par Saint Laurent, le film fait défiler des costumes souvent hauts en couleur de la célèbre maison de couture. En créant sa propre société au mois d’avril dernier, Saint Laurent inaugure l’entrée en matière du luxe dans la production cinématographique.
Voir la bande d’annonce de Strange Way of Life.
