Réalisateur : Peter Bogdanovich

Casting : Ben Gazzara, Denholm Elliott, Peter Bogdanovich

Genre : Drame

Sortie : 5 Décembre 1979 (France)

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Synopsis : Dans les années 1970, Jack Flowers ouvre un bordel à Singapour où il espère faire fortune et son ami, le comptable William Leigh, le soutient dans son entreprise. Toutefois, Jack doit faire face à la pègre locale hostile à son activité. La réalité de la guerre du Vietnam intervint dans son quotidien quand la CIA lui propose d’ouvrir un bordel spécialement destiné aux soldats en permission.

“Une atmosphère étouffante mais séduisante.” Tel sont les mots pour définir le plus aisément Saint Jack. Un roman de Paul Théroux sorti en 1973 puis adapté par la suite par Bogdanovich en 1979. 

C’est le 10ème long-métrage de Bogdanovich et il n’est pas idiot de dire que ce dernier conclut admirablement ses 10 premières réalisations. Un résumé de la carrière qui précède le réalisateur n’est pas l’objectif, néanmoins il est important de notifier qu’il a acquit une certaine notoriété notamment avec La dernière séance en 1971. Au moment ou le projet de Saint Jack émerge, Bogdanovich est dans une phase de doutes et souhaite s’éloigner des Etats-Unis suite à ses précédents échecs commerciaux (« Enfin l’amour » de 1975 et  « Nickelodéon » de 1976). 

Le livre tombe alors à pic puisqu’il décide alors d’adapter le roman suite au conseil d’Orson Welles, qui souhaitait l’adapter mais fut dans l’impossibilité de mettre à bien ce projet. 

Le destin lui a bien réussi puisque ce film est doté d’une simplicité visuel charmante, d’une sensualité unique et d’un charisme hors-pair porté par le grand Ben Gazzara.

Ben Gazzara et Peter Bogdanovich sur le plateau en 1978.

Bogdanovich nous met dans l’ambiance dès le premier plan. Un port, une ville, l’Asie, le tumulte et le vacarme. Le spectateur devine alors une épopée riche en rebondissements, qui s’avérera être le cas.

 La première citation du début de l’article ne mâche pas ses mots puisque l’atmosphère, l’ambiance qui règne dans Singapour, c’est la chaleur et Bogdanovich nous le fait comprendre. Les personnages transpirent, toutes les fenêtres sont ouvertes, les habitants vivent leur vie au jour le jour comme s’ils étaient en vacances et cette détente quotidienne qu’arbore le film, c’est Gazzara qui l’illustre.

Il est important de notifier que le film est le premier d’Hollywood a être tourné entièrement en décors extérieurs, avec des acteurs non-professionnels qui habitaient à Singapour. Les plans sont très rarement fixes et ils se marient parfaitement a la vie que Jack Flowers mène, une vie trépidante. Le film est tellement réaliste qu’on a parfois l’impression d’assister à un documentaire.

De gauche à droite : Bogdanovich, Monika Subramaniam et Gazzara.

C’est à travers l’arrivée de William Leigh, un comptable venu de Hong-Kong que l’on découvre le quotidien de Jack, le célèbre mac. Ce dernier lui présente la ville et les différentes occupations qui la résume. Ces dernières sont très primaires; les filles, l’argent et l’alcool. Néanmoins on remarque immédiatement que cette ville possède un charme évident.

Nous allons vite comprendre que cette ville cache bien son jeu. Jack connait tout le monde, mais il est en réalité seul, livré à lui-même dans cette cohue asiatique. Ses seules attaches sont en fait, ses filles, donc son seul moyen de subvenir à ses besoins.

Bogdanovich nous jette dans cette jungle sans aucune explication, que ce soit à propos du contexte, ou du passé des personnages (que l’on saura un peu plus tard dans le film) . Ce n’est pas un hasard, c’est tout simplement une ruse rondement mené afin de focalisé le spectateur sur ce qui va arriver à l’intérieur de cette ville. Tout ce que l’on apprendra par la suite, c’est l’époque durant laquelle se déroule l’histoire. Probablement en 1975,à la fin de la guerre du Vietnam, puisque pendant le film la présence et par la suite l’absence soudaine des soldats américains est notifiante.

Nous avons parlé précédemment des 3 choses qui résume Singapour. On pourrait tout d’abord penser que c’est un film de gangsters. C’est une erreur car ce n’est pas le cas et il est impossible de catégoriser Saint Jack tant ce film est unique.

Cette jungle, comme j’ai qualifié ce film, Jack en est prisonnier en réalité. Le réalisateur nous le montre lors d’un gros plan de face de Gazzara. Américain refoulé et menacé par les concurrents locaux nous suivons un personnage perdu, sans réel avenir mais qui prend à la légère, avec humour ces faits. “ On fait l’amour pour des raisons idiotes pourquoi pas pour du fric ?”

On le remarque notamment lorsque un de ses “amis” est tué. Il accorde un petit regard au cadavre mais sa première pensée n’est pas de se venger. Il est indifférent au monde qui l’entoure.

On pourrait diviser le film en deux parties, la première heure pourrait s’identifier aux ambitions de Jack, qui est d’ouvrir une maison clothe à Singapour. Puis la deuxième heure n’est autre que le retour à la réalité, notamment illustrée avec l’arrivée des soldats américains.

La première partie est similaire à un rêve. En effet les menaces des locaux ne sont pas sérieuses et l’on découvre la vie amusante que mène Flowers. D’autre part, la seconde partie, quant à elle, s’illustre par la cruauté de Singapour et c’est un retour à la réalité. D’autant plus que Bogdanovich n’hésite pas à faire passer un message politique lorsque Jack parle des jeunes soldats qui viennent dans son bordel.

« On les engraisse pour les envoyer à l’abattoir. » Une dénonciation évidente de l’idiotie de la guerre du Vietnam. Singapour est vu ici comme un poison, une drogue dont on ne peut se passer. Cette ville est toxique et laisse sa marque. Pendant le film, Jack se fait tatoué, malgré lui, c’est symbolique. Il ne peut se séparer de Singapour, il est prisonnier et il le sait. Sa vie est ici.

NOTE : 9/10

« Il n’y a rien à attendre d’une ville qui a de tels origines. »

Jack Flowers

Il est difficile de catégoriser et de définir Saint Jack. Comme il est dit précédemment ce film possède une aura unique, rarement vu dans le cinéma. On peut néanmoins l’inscrire dans le Nouvel Hollywood car il possède certaines caractéristiques communes avec les films de Scorcese ou de Coppola. On tombe immédiatement amoureux du film.

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