Il est en forme, très en forme le cinéma français cette année. 2022 était déjà garni de films francophones divers et qualitatifs et voilà que Nicolas Bedos qu’on apprécie beaucoup depuis Mr & Mme Adelman et La Belle Époque et même son OSS 117, frappe une nouvelle fois très juste avec Mascarade.
Une escroquerie qui ne manque jamais de ressorts, Bedos s’éloigne de la vieille époque pour aller dans le contemporain et filmer la prospérité dans toute sa splendeur (et tout ce qu’il y a de plus faux), mais c’est aussi une immense comédie qui sait faire rire quand il le faut avec spontanéité. Que ce soit Isabelle Adjani qui adopte un jeu théâtral et fait la diva un peu sotte ou Marine Vacth en lâcher prise aux desseins machiavéliques, tous sont justes !
Nicolas Bedos possède un certain savoir-faire unique pour écrire des dialogues subtils, et des contextes improbables, Mascarade est muni des deux et pousse le curseur encore plus loin. C’est cosy mais aussi modeste, drôle mais encore dramatique, et quand on pense arriver au fin mot de l’histoire, Bedos sort une nouvelle carte et l’intrigue reprend de l’aile. Il se plaît à nous baigner dans ces décors tape à l’œil, même si on sait qu’il a une préférence pour la classe moyenne, il le faisait bien comprendre dans la Belle Époque. Ici c’est faussement extravagant car tout ça dissimule des ficelles scénaristiques diaboliques. Mascarade est un film diabolique avec un duo de choc qui fait des étincelles (on est pas si loin de Bonnie and Clyde). Niney en romancier fou amoureux de sa belle prêt à tout pour lui venir en aide est génial, il paraît manipulable et gauche en même temps, face à une Marine Vacth crue. Le contraste forme un couple si convaincant pour cette mascarade si brillante qui au final prend tout le monde à revers.
Ces derniers temps le cinéma adore dépeindre les riches et les pauvres et la chute des deux. Triangle Of Sadness, L’origine du mal, et maintenant Mascarade, une certaine mode s’installe mais chacun avec un ton différent. Nicolas Bedos s’en moque et prend un plaisir ironique à filmer deux, trois scènes sur un magnifique yacht avec Pierre Niney qui a le mal de mer, tandis que Vacth séduit François Cluzet avec un accent anglais élégant pour finir dans un appartement paradisiaque avec une vue imprenable sur la côte d’Azur.
Heureusement c’est bien plus drôle que too-much, Mascarade comme sur les précédents films de l’auteur confronte astucieusement deux générations de cinéma français. Niney et Vacth d’un côté, Cluzet, Adjani et Emmanuelle Devos de l’autre. Et pourtant rien ne l’empêche d’en faire des personnages trompés et manipulés, les nouvelles gloires du cinéma français s’imposent et prennent place. Une métaphore divine et subtile, à l’image du cinéma de Bedos finalement.
Mascarade peut se placer dans le podium des meilleures surprises de ce début de fin d’année. Intelligent, mené comme des pions sur un échiquier où tout peut se renverser d’un instant à l’autre, doté d’un humour jamais forcé, et d’une ironie insoupçonnée, voilà où cette nouvelle prouesse de Bedos réussit là où certains échouent. Peu de hics à part une fin qui s’éternise. Sans doute par peur de bâcler, mais si ça permet un final en beauté on pardonne, et en effet l’ultime plan très bien trouvé nous prouve qu’on aura tous été bernés. Rien de plus à dire c’est un sans faute.
Le film est disponible depuis ce 1er novembre en salles. Une magnifique façon d’entamer ce mois.
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