? Réalisateur : Kenneth Lonergan

? Casting: Casey Affleck (Will Hunting), Michelle Williams (Blue Valentine) , Lucas Hedges (Three Billboards : Les Panneaux de la Vengeance)

? Genre : Drame

? Pays : Américain 

? Sortie : 14 décembre 2016 (France)

Manchester by the sea nous raconte l’histoire des Chandler, une famille de classe ouvrière, du Massachusetts. Après le décès soudain de son frère Joe (Kyle Chandler), Lee (Casey Affleck) est désigné comme le tuteur de son neveu Patrick (Lucas Hedges). Il se retrouve confronté à un passé tragique qui l’a séparé de sa femme Randi (Michelle Williams) et de la communauté où il est né et a grandi.

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Kenneth Lonergan est un réalisateur, scénariste et dramaturge américain né à New-York en 1962. Connut notamment, pour sa participation au film Gangs of New York (2002) de Martin Scorsese mais surtout pour Manchester By the Sea (2016). Cette œuvre récompensée à deux reprises aux oscars, pour celui du meilleur acteur et celui du meilleur scénario, se situe dans la ville de Manchester où Lee Chandler, suite à l’annonce du décès de son frère doit retourner s’occuper de son neveu. Cependant, cette ville représente un drame familial pour le protagoniste qui a du mal à gérer cette situation. 

En effet, le film suit le personnage allant du plus externe au plus intime. Cela se traduit, par le montage qui évolue ; d’abord par des plans majoritairement dans le présent glissant jusqu’au flashbacks de plus en plus répétitifs. Ce système permet un suspense insoutenable empêchant tout d’abord de saisir toutes les clés. Pourquoi est-il parti ? Pourquoi est-ce si douloureux de revenir alors que la mort de son frère ne semble pas l’affecter totalement ? Cette double temporalité signifie une entrée dans l’esprit du personnage. Le spectateur est soumis aux mêmes questionnements et tiraillements découvrant pas à pas la raison de son départ. L’identification est alors plus simple et rappelle à tous cette sensation de rentrer dans sa ville natale, avec un drame ou non. Les souvenirs nous envahissent sans pouvoir rien n’y faire. 

Ainsi, nous pouvons nous demander comment le film parvient-il, par le biais du personnage de Lee, à faire émerger la thématique de la famille ?  

Pour commencer, nous allons analyser en détails la scène d’exposition du film (00’ à 13’57). Selon, moi c’est un extrait riche, dans le sens où il présente le personnage de Lee Chandler, de manière externe jusqu’à l’interne. En effet, le film débute sur des plans fixes sur la mer, près de côtes. Une musique empathique démarre accompagné d’un plan sur un bateau « Claudia Marie », qui confirme la localisation puisque nous pouvons apercevoir l’inscription « Manchester » sur son flanc. Ces plans larges donnent une impression de liberté et de liens heureux pour la suite. Une voix apparaît alors en hors-champ pour devenir visualisée. Effectivement, deux adultes et un enfant sont présents sur le bateau. Les deux hommes sont dos à dos, l’un à la barre et le second à s’amuser avec l’enfant. Un rapport de force s’installe, où l’on comprend que le protagoniste sera celui qui monopolise la parole et pose des questions. L’homme et l’enfant, se chamaillent de manière tendre à la limite du conflit. On constate qu’il empêche de se diriger vers l’homme à la barre. Ce qui se confirme par la suite dans leur discussion. Assurément, le personnage joué par Casey Affleck pose une question à l’enfant : « Ton père est doué, mais il comprend pas tout ce que je comprends. […] Si tu pouvais prendre un mec avec toi sur une île, avec lequel tu serais en sécurité, un mec qui se débrouillerait pour survivre, pour rendre l’île agréable, faire que tu sois heureux … Le mec le mieux qualifié quoiqu’il arrive. Tu prendrais ton père ou moi ? ».

Cette question annonce déjà un choix à effectuer imposé par Casey Affleck, faisant écho à la fin du film c’est-à-dire partir à Boston plutôt que de rester à Manchester, où vivait son père. 

La réponse de l’enfant « Mon papa », annonce le conflit énoncé plus haut. Le jeune garçon luttera pour rester à Manchester. En somme, le spectateur comprend uniquement le lien entre l’enfant et l’homme à la barre, une relation paternelle. Cependant, ce personnage identifié comme protagoniste reste proche des autres, sans que l’on sache s’il fait partie de la famille. Cette idée se confirme par un plan large panoramique vers la droite, vers le présent, poussant à la sortie du bateau. 

Au terme de ces 3’26, avec des plans aux couleurs froides et en majorité fixes, le spectateur pense être propulsé dans une histoire avec tous les personnages présents dans le cadre. Ce qui est vite balayé par les plans suivants. 

© Universal Pictures International France

Ensuite, de 3’26 à 04’24, la musique s’arrête brusquement pour laisser place à des sons en prise directe. Les plans fixes présentent une ville non portuaire, enclavée qui paraît tout d’un coup étouffante. En effet, les plans larges synonymes de liberté laissent place à des bâtiments aux couleurs ternes, sous la neige. Cet argument permet de retrouver l’homme sur le bateau du début du film. Effectivement, il est présenté dans une petite cour en train de déblayer la neige d’un chemin. Son expression est tirée et triste, ce qui créer une rupture brutale entre l’avant et l’après. Le spectateur ne sait toujours rien de ce personnage, pas même son nom. Correspondant à une polarisation personnage, étant donné qu’il sait tout.  

Jusqu’ici le personnage n’est pas présenté dans des espaces qui lui sont personnels mais le réalisateur continue de le mettre en scène dans la vie d’autres personnes. Dans ces espaces, on constate beaucoup de surcadrage, comme si nous entrions avec le personnage dans l’intimes de ces gens. En effet, entre 4’24 et 9’05 le personnage pénètre dans des tranches de vie qui abordent deux thèmes importants pour lui : la famille et la séduction. 

Véritablement, le premier client permet de le définir comme homme à tout-faire puisqu’il répare sa cuvette de toilette. Le protagoniste est las et fait encore comparaison avec ce personnage si joyeux et joueur du départ. L’idée de flash-back commence à émerger dans l’esprit du spectateur. Nous sommes dans l’ici, dans l’appartement de cet homme crédible par le son acousmatique de la télévision donnant une impression de quotidien. Le vieil homme parle de sa famille face au personnage d’abord muet, détournant le sujet en proposant des solutions qu’il ne peut réaliser pour les toilettes. De la même façon, la scénette avec la dame âgée propose cette même problématique, la présentant au premier plan et le protagoniste en arrière-plan changeant une ampoule. La dame parle d’un évènement familial dont elle est forcée d’assister. Ses paroles sont tranchantes accompagné du même son acousmatique de la télévision. 

Manchester by the sea aborde le thème de la séduction intervient à un moment inattendu chez la prochaine habitante. On y découvre le protagoniste avec une expression toujours aussi fermée qui semble se débloquer lentement lorsqu’une voix hors-champ apparaît où la femme semble avoir une conversation au téléphone, expliquant qu’elle craque pour l’homme à tout faire. Une attente est créée chez le spectateur, qui se demande si elle va aborder le sujet « Vous acceptez un petit truc ? ». Le spectateur est comme le protagoniste, se demandant ce qu’elle va dire. La révélation « Un petit billet » nous déçoit et sûrement le protagoniste. 

Cependant, cette thématique aborde une autre caractéristique d’un personnage « au bord de la crise nerf » comme pourrait l’appeler Pedro Almodóvar. En effet, le personnage de Lee est face à une femme agressive dû à un problème de douche. Celle-ci le pousse à dire des choses qu’il ne voulait pas dire, le faisant passer pour un pervers.  

Le personnage mutique et observateur évolue vers une forme d’insolence, qui le pousse à attaquer. Cette caractéristique se retrouve lors de l’entretien avec son patron faisant suite au conflit. Les paroles du patron donnent un tout autre portrait du protagoniste « J’ai sans arrêt des plaintes. T’es bourru, mal-aimable, tu dis pas bonjour […] » qui encore une fois se défend assurément en présentant ses qualités. Son insolence lui permet de « gagner » face au patron qui cède et appelle lui-même la cliente « D’accord. Je lui parlerai ». Commence alors une lente progression vers l’intime du personnage. 

© Universal Pictures International France

Dans Manchester by the sea, la scène du bar révèle une association entre problème de séduction et crise de nerf. En effet, Lee est seul au bar en plan rapproché avec un acousmètre qu’on suppose être le barman. On constate qu’il doit être un habitué par rapport à leur discussion. Mais très rapidement, le plan s’élargit pour faire apparaître une femme, qui va draguer Lee Chandler. Celui-ci impassible décline toute conversation montrant une difficulté à communiquer et à séduire. Cette idée de lien entre violence et séduction, se retrouve par les plans alternés entre les deux hommes qui discutent en face de lui et la femme l’ayant dragué maintenant aux bras d’un autre homme. Le spectateur peut comprendre une sorte de frustration, comme une sensation d’avoir raté quelque chose. Ainsi, nous avons l’impression d’être un peu plus dans l’esprit de Lee, qui ayant failli va se défouler « je veux jouer » sur les deux hommes en face de lui sans raison. Il est intéressant de noter que la musique au départ empathique bascule à l’anempathique puisque le rythme entraînant ne correspond pas à une scène de bagarre. 

A 12’35 le spectateur accède enfin à un espace où il vit : son appartement en sous-sol. Cependant, la visibilité est partielle en raison de la nuit et de la faible lumière provenant de la lampe de chevet. Le personnage de Lee est de dos, dans l’ombre ou alors endormi devant sa télévision que l’on entend. La taille de la fenêtre ajoute une dimension d’étouffement. Ce qui est appuyé par le plan rapproché de la fenêtre (13’11) qui créer un effet de surcadrage et de prison. 

Dans Manchester by the sea, le glissement vers l’intime se concrétise véritablement à partir de 13’13 notamment par la musique leitmotiv du début du film. Pour la première fois, nous voyons le personnage sortir de son propre appartement et commencer à déblayer un chemin qui n’est pas à lui. Entre chaque scénette chez des habitants de l’immeuble, on retrouve une fréquence pour de nombreuses scènes. Notamment, ce déblayage du chemin, les plans sur la poubelle mais aussi un plan sur les bâtiments de Boston. Ce qui ajoute une dimension de répétition d’un quotidien monotone. Cependant, cette fois-ci la tâche répétitive est interrompue par un appel où l’on connait enfin son prénom. Le personnage de Lee n’est pas au centre du cadre et affiche un regard vide sûrement synonyme de mauvaise nouvelle « C’est arrivé quand ? Et il va comment ? oh… ». La polarisation personnage est toujours présente, puisque le spectateur ne sait pas ce qui est dit au téléphone mais lui si. Le leitmotiv laisse à penser que cette annonce concerne l’un des personnages du début. Mais, n’entendre que lui et non pas l’interlocuteur, nous empêche de tout comprendre. Cela créer encore un suspense et une attente chez le spectateur qui va être embarqué de force avec Lee à Manchester, le ailleurs. Cette transition est douce grâce à une disjonction proximale. 

En poursuivant, on constate que la ville de Manchester apparaît comme une madeleine de Proust pour le personnage de Lee. En effet, celui-ci a quitté la ville il y a quelques années mais revient aujourd’hui. Si le récit démarre au présent dans le quotidien de Lee, l’arrivée à Manchester est marquée par des flash-backs de plus en plus répétés. Son rapport au temps et plus précisément au passé reste complexe. 

Tout d’abord, le montage favorise l’impact du temps notamment avec la fréquence. Comme énoncé précédemment la scène d’exposition propose des répétitions du quotidien. Mais ce jeu de comparaison intervient également pour la scène de bagarre à 12’13 ce qui est répété à 1 :58 : 47 du film ou encore par le souvenir de la maison en feu (55’44) et la nourriture qui brûle (2 :03 :41). Le personnage semble perdu dans un schéma, face auquel il ne peut lutter. De plus, par le montage rapide les flashbacks sont présentés comme des souvenirs. Pensons principalement à cette première « apparition » où Lee est dans sa voiture en direction de Manchester (15’49). Cet indice montre bien que cette fois-ci nous sommes totalement dans l’esprit du personnage, sans filtre et ne pouvant rien cacher aux spectateurs.  Cependant, cet effet intervient après avoir raté des informations. Les spectateurs sont forcés de reconstruire le puzzle entre le passé et le présent du personnage de Lee. En effet, dès que le personnage arrive à Manchester, plus précisément à l’hôpital, nous en savons moins que le protagoniste dans le sens où il connait tous les personnages face à lui, demandant par exemple le « Dr Betheny ». Ce sont les dialogues qui nous permettent d’avancer notamment sur le fait que le mort soit son frère, décédé d’une crise cardiaque. A ce stade, même s’il connait les personnes autour de lui, nous en apprenons autant que lui sur les autres détails. La polarisation devient alors énonciateur. 

La question du temps qui passe et de celui qui manque surgit aussi dans Manchester by the sea. Dès 17’33 lorsque le médecin évoque qu’il est arrivé trop tard. Lee fait l’erreur de ne pas prendre le temps ce qui fait écho au passé, une fois encore. Ce moment peut être relié à la scène du testament (49’32) où l’on comprend que le drame qui l’assaille est la mort de ses trois enfants. Il n’a pas pris le temps de fermer la vitre du feu déclenchant un incendie et leur mort. Cette scène est pour moi, un moment clé permettant de comprendre les craintes du personnage. Lee a saboté sa propre vie par une erreur d’inattention. L’idée de devoir s’occuper de son neveu le rend alors malade, se sentant sûrement indigne. Un dilemme se présente à lui, limité par le temps jusqu’à l’enterrement : s’installer dans cette ville au sombre passé ou retourner à Boston pour être homme à tout faire ? Est-il réellement capable de reconstruire un foyer, pour le bien être de son neveu ? 

Le personnage de Lee Chandler tente de reconstruire un foyer avec son neveu Patrick. Cependant, cela nécessite un long parcours pour chacun des personnages. 

A l’origine, Lee souhaite partir à Boston entraînant son neveu avec lui, incapable de faire face aux multiples souvenirs qui l’attaquent. Son personnage est froid, peu tactile mais malgré tout touchant et aimant. Les deux hommes ont du mal a exprimer leurs sentiments principalement par rapport au décès de Joe Chandler.  L’élément déclencheur de cette reconstruction intervient lors de la scène du poulet dans le congélateur (1 :28 :50). Le personnage de Patrick ne peut supporter de voir du poulet totalement congelé, lui rappelant son père à la morgue. Les actions de Lee changent à partir de ce moment-là, s’inquiétant profondément allant jusqu’à ouvrir, de force, la porte de la chambre de Patrick (1 :30 :05). 

© Universal Pictures International France

La dynamique du film se base sur cette reconstruction des liens familiaux, par des évènements symboliques.  A 1 :34 :05, Lee fait ses cartons et entame son déménagement vers Manchester et accepte de prendre la chambre de Joe. Puis, il commence à postuler sur le port et dans un garage pour travailler à Manchester (1 :38 :16). Ce rapprochement se traduit principalement à 1 :42 :49 où Lee occupe la mère de la petite amie de Patrick pour qu’il puisse conclure. Connaissant la difficulté de Lee avec la séduction, ce geste reste puissant à ce stade du film. Tout comme à (1 :52 :39) avec une proposition venant de lui, de vendre des armes de collection pour réparer le moteur du bateau.  

Les personnages fonctionnent à présent en duo, s’aidant l’un l’autre. Ils commencent à reconstruire une unité de famille ce qui se ressent aussi, dans leurs attitudes ou langage parfois chartrier. Patrick et Lee sont deux personnages maladroits qui ont un côté enfantin. Cette ressemblance se distingue à 1 :28 :31 lorsque Patrick enfant arrive trop tard pour saluer son oncle, une ressemblance de plus avec Lee. 

Les personnages au départ, souvent l’un face à l’autre ou seul dans le cadre, finissent par y être tous les deux. Cet indice prouve cette harmonie familiale avec deux personnages face à nous. Bien que le personnage de Lee ne reste pas à Manchester, cette cohésion se marque par la poursuite de ces plans où ils apparaissent ensemble. Malheureusement, même si le protagoniste parvient à vivre avec les souvenirs, des personnages, synonymes de cette période, l’empêchent de conserver cette reconstruction. 

Une disjonction renaît alors entre Lee et l’espace de Manchester. En effet, les souvenirs semblent surmontables mais dès 1 :45 :46 l’entrée en scène de l’ex-femme de Joe provoque un raz-de-marée de mauvais souvenirs. Comme le spectateur le comprend plus tôt dans un flash-back à l’hôpital, Lee ne supporte pas cette femme hystérique et égoïste. Il arrive cependant à se faire violence pour répondre aux besoins de son neveu, désirant revoir sa mère. Cependant, l’évènement qui va faire basculer Lee dans son ancien schéma sera la discussion avec Randi, son ex-femme.

© Universal Pictures International France

En effet, on apprend vite que ce personnage est nouvellement maman et mariée. Celle-ci semble à chaque apparition s’être reconstruite. Mais à 1 :55 :28 Randi effectue une déclaration d’amour à Lee expliquant qu’elle l’aime toujours. Elle apparaît ici comme un opposant qui empêche Lee de rester à Manchester. Ensemble, ils ont créé trois beaux enfants mais à cause de lui, ils n’ont plus rien. Cette rencontre est d’une douleur trop extrême pour Lee qui se bat à nouveau dans un bar. Certains personnages (Randi, ex-femme de Joe, femme du port) sont des obstacles à sa nouvelle vie. Ce qui peut également qualifier l’espace de Manchester en lui-même en parlant de disjonction. Lee est rejeté par cet espace et ceux qui l’habite. Il est possible d’aller jusqu’à dire que Lee est un opposant envers lui-même dans le sens où il ne se pardonne pas et est hanté par ses erreurs. Ainsi, il abandonne cette reconstruction et s’arrange pour que son neveu reste. C’est un moment où l’on constate l’évolution du protagoniste capable de s’exprimer allant jusqu’à pleurer face à son neveu (2 :04 :34). Leur relation s’est améliorée comme on peut le constater après l’enterrement de Joe, où Lee envoie une balle à Patrick comme pour s’amuser. 

En somme, les mots de première scène résonnent avec cette fin, où le fils est contraint de choisir son père (Manchester) et Lee de fuir le passé. Le montage de Manchester by the sea est circulaire commençant par une scène en mer sur le « Claudia Marie » et les personnages canne à pêche à la main.

Note

8/10

Note : 8 sur 10.

Manchester by the sea récompensé Meilleur scénario et Meilleur acteur pour Casey Affleck, nous propose une plongée au coeur du passé. Au rythme d’un montage aux allures de puzzle, l’identification est inévitable….

https://www.youtube.com/watch?v=mzMYKsRPsI8

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