Deauville : dernier jour de festival. Plus de compétition, plus de jury.

prix d'Ornano-Valenti

Comme tous les ans, à 10h30, on remet au Centre International Deauville le prix d’Ornano-Valenti, qui récompense un premier film français. Depuis que nous venons au festival, nous avons pu compter parmi les lauréats de ce prix Les Magnétiques de Vincent Maël Cardona, Falcon Lake de Charlotte Le Bon ou Rien à Perdre de Delphine Deloget. Cette année, c’est Rabia de Mareike Engelhardt qui reçoit ce prix. Un film fort sur l’endoctrinement de femmes dans le conflit en Syrie et dont les personnages sont très puissants et brillamment interprétés. Pour un premier film, on tire notre chapeau !

Megan Northam dans Rabia © Memento Distribution
Megan Northam dans Rabia © Memento Distribution

Une dernière séance...

On mange une dernière fois dans notre restaurant préféré, le temps de dire « à l’année prochaine « , puis on se dirige vers l’avant-première du Robot Sauvage, nouveau film d’animation de DreamWorks. Assis dans nos sièges, on nous interdit carrément de sortir nos portables (on est de retour aux pochettes plastiques de Dune en 2021 et de Blonde en 2022…). Comme si quelqu’un allait filmer pendant 1h40 et alors que la moitié de la salle est constituée d’enfants…bon.

Après avoir vu le film, on comprend pourquoi quelqu’un aurait peut-être voulu garder une preuve, un souvenir, au moins un petit quelque chose de cette fresque complètement folle, épique avec de la musique à fond et de vrais enjeux émotionnels impactants. C’est encore un travail monstrueux qui sort du studio. Les enfants ne savent même pas à quel point on leur donne du bon cinéma.

Le Robot Sauvage © Universal Pictures
Le Robot Sauvage © Universal Pictures

Natalie Portman et le prochain (peu désirable) Lelouch

En attendant que l’électricité people apparaisse doucement sur le tapis rouge, on reprend un verre au Normandy et on y croise Benoît Magimel qui, à ce moment-là, caché derrière ses lunettes de soleil, avait déjà son verdict…verdict foireux, mais on ne le savait pas encore. Alors, on lui sourit un peu bêtement.

Le temps d’aller chercher ses places, on nous dit que la salle est pleine…Pas grave, on ne perd pas une seconde et on va chercher Natalie Portman. Par miracle, on la croise sortant de son hôtel avec une dizaine d’autres chanceux : au bon endroit au bon moment. Elle nous fait un petit signe de la main et monte dans sa voiture. Premier problème réglé.

Le second ne s’est même pas vraiment posé, puisqu’on ne voulait pas voir le dernier film de Claude Lelouch, Finalement, projeté ce soir après la cérémonie. Son film d’avant (qui devait déjà être le dernier), L’amour c’est mieux que la vie, projeté au festival en 2021 était déjà trop gênant pour nous. Qu’en est-il pour Finalement ? On arrive à avoir quelques retours sur ce film : le point de vue sur le monde d’un homme de 86 ans, complètement dépassé, politiquement incorrect, voire dégueulasse. On aurait quitté la salle !

Miracle, on trouve la cérémonie de clôture en direct sur YouTube ! On la regarde depuis notre maison en mangeant des croques-monsieur. Peut-être que c’était mieux comme ça.

Natalie Portman au Festival de Deauville
Natalie Portman © Lou Benoist, AFP

Le Palmarès

Passons vite sur ce palmarès. Après une telle compétition, chaque film (ou presque) avait le potentiel de gagner quelque chose. Néanmoins, excepté pour nos rares vraies surprises, aucun film ne nous tenait vraiment à cœur pour que l’on soit complètement absorbé par cette cérémonie (rien à voir avec Aftersun par exemple, celui pour lequel on s’était levé en criant). Aucun de ces films n’a pour l’instant de date de sortie.Le public, Canal + et la critique sont les premiers à donner leur verdict. Le Prix du public est attribué à The Stranger’s Case. Ce n’est pas surprenant : c’est sensationnel, ça explose, ça fait sursauter, ça prend aux tripes…bien que nous tenions cette démarche en effroi, le public de Deauville, lui, ne fait sûrement pas la différence.

Pour le 50ème anniversaire du festival, Aude Hesbert (la présidente du festival) rajoute des prix. Comme s’il n’y en avait pas déjà assez. Alors nous voilà avec le Prix du jury Canal + Spécial 50ème, qui revient à The School Duel. C’est gentil, mais sans un cinquantenaire, le film n’aurait rien gagné. Cela nous permet quand même de voir Kue Lawrence, le jeune acteur de 10 ans, débordant de reconnaissance, monter sur la scène et fondre en larmes devant le micro. Faire un film, ça demande du temps et beaucoup d’énergie, gagner un prix à cet âge-là, ça met un peu d’ordre.

Après ce prix vient le Prix de la critique. On adore Eva Bettan, la présidente du jury de la critique de cette année. Tous les ans, elle est là et tous les ans, elle fait les bons choix. Sans elle, le palmarès de cette année nous aurait paru complètement vain. David Fortune et William Catlett à qui on avait dit « on espère que vous gagnerez quelque chose car votre film le mérite » ne rentrent pas les mains vides. Car en effet, c’est Color Book qu’on appelle sur la scène…enfin !

Oscar Nuñez et Kelsey Darragh dans The School Duel
Color Book

Prix de la Révélation, Prix Barrière et Prix du Jury

C’est au tour d’Alice Belaïdi, présidente du jury de la révélation, de remettre son prix. Et c’est là que commencent les emmerdes. In The Summers. La réalisatrice de ce remix timide d’Aftersun n’est pas présente. Tant mieux ! On va peut-être gagner du temps, surtout quand on nous rajoute (encore) un prix : le Prix Barrière du 50ème. Je ne sais plus qui a remis celui-là, mais c’est à La Cocina qu’on l’a donné, alors ça va. De loin le film qui méritait le plus. Mais il est dommage de se dire que, comme The School Duel, il gagne grâce à l’anniversaire.

Le jury, ou plutôt Benoît Magimel, de remettre encore deux prix. Magimel à qui a-t-on peut-être dit « cette année, on récompense déjà la moitié des gens, alors pas d’ex æquo s’il te plaît ! » (chose qui arrive bien souvent à Deauville). C’est donc The Knife qui vient récupérer seul le Prix du Jury. C’est très bien, compréhensible.

Là où les choses se corsent, c’est quand on rappelle In The Summers pour le Grand Prix (deux récompenses, sérieusement ?). Peut-être avons-nous raté quelque chose, mais la compétition ne nous paraîssait pas si fainéante. Sing Sing repart donc bredouille (dont vous pouvez lire ici la critique très positive de Lucas), tout comme Daddio ou encore Gazer. Bref.

René Pérez, Sasha Calle et Lio Mehiel dans In the Summers © Music Box Films
René Pérez, Sasha Calle et Lio Mehiel dans In the Summers © Music Box Films

Récapitulatif du Palmarès :

  • Prix du public : The Stranger’s Case, réalisé par Brandt Andersen.
  • Prix du jury Canal + Spécial 50ème : The School Duel, réalisé par Todd Wiseman Jr.
  • Prix de la critique : Color Book, réalisé par David Fortune.
  • Prix de la révélation : In the Summers, réalisé par Alessandra Lacorazza.
  • Prix barrière du 50ème : La Cocina, réalisé par Alonso Ruizpalacios.
  • Prix du Jury : The Knife, réalisé par Nnamdi Asomugha.
  • Grand Prix : In The Summers, réalisé par Alessandra Lacorazza.

Une dernière journée fatigante, rythmée par seulement deux films et une incertitude dont on n’a pas l’habitude (étant donné qu’en festivaliers aguerris, on arrive toujours normalement à se faufiler quelque part). Le train du dimanche part à 10h20. Pas le temps de voir Deauville redevenir Deauville et le festival doucement disparaître, on doit aller à la gare. On y retrouve des visages familiers, ceux avec qui on s’est assis pendant une semaine dans la même salle, à voir les mêmes films, à partager nos émotions. Eux aussi rentrent à Paris. On est le 15 septembre, la rentrée est déjà passée.

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