Les films d’aujourd’hui ont-ils trop de rythme ? Je me pose cette question depuis quelques temps maintenant, devant les difficultés de traitement que j’observe dans beaucoup de films modernes. Est-ce que ce surplus d’action est-il une surprise ou résulte-t-il des mouvances du cinéma ?
Le premier point dont nous devons parler, à mon sens, table sur la durée des films. Lorsque la grande majorité des films dépassait les deux heures (voir les trois) avant les années 60, on observe qu’aujourd’hui qu’il est rare qu’une oeuvre dépassait les 2h15. Comment explique-t-on ce changement ? Tout simplement par les changements de notre société. Aujourd’hui, on ne va plus au cinéma pour la journée ; on a envie d’être divertit proprement et surtout rapidement. Les longs films font généralement des scores très en deçà des autres, ce qui incite les producteurs d’aujourd’hui a réduire la durée des films. Il faut donc aller plus vite qu’avant dans l’histoire pour satisfaire le spectateur, et donc imposer plus de rythme.

Mais ce changement de durée n’explique pas tout. Les choix de mise en scène interviennent généralement beaucoup sur l’impression que le spectateur du film. Si l’on donne le même scénario à Kubrick ou à Tarantino, je ne suis pas sûr que vous aurez les mêmes sensations au cinéma si vous allez ses deux réalisations ! Une liste de Sens Critique nous dévoile la longueur moyenne des plans de quinze réalisateurs. Et (surprise, ou pas), on retrouve aux cinq premières places Billy Wilder (le réalisateur de Certains l’aiment chaud, de 1959), Andreï Tarkovski (Solaris, 1972, et 2h47), Béla Tarr (qui arrive à atteindre les 7h30 de film avec Le Tango de Satan, sorti en 1994), Woody Allen (même si, je vous l’accorde, le cas de Woody est un peu particulier car il est à cheval sur plusieurs générations de cinéaste), et notre Jean-Luc Godard national .Inversement, les quatre dernières places sont occupées par 4 réalisateurs en activité, à savoir Steven Soderbergh, Steven Spielberg, Christopher Nolan et Michael Bay. Cette liste montre simplement que le cinéma actuel a des plans beaucoup plus court avec des choix de mise en scène qui impose par conséquent un rythme plus soutenu au film.

Enfin, troisième et dernier point sur lequel je souhaite m’attarder, c’est le traitement du scénario. La durée des films se réduisant, les scénarios s’étoffent moins. Prenons un exemple : j’ai récemment vu Ted 2 ; j’avais beaucoup apprécié le premier volet pour son jeu sur les codes cinématographiques très intéressant. Ce deuxième volet est bourré de bonnes intentions et beaucoup plus mature ; mais la volonté de rythme est telle que aucune idée n’est véritablement traité, et la volonté de rythme donne un film plat et sans intérêt. A contrario, un film comme Taxi Driver prend son temps et traite (avec moins de rythme, certes) mieux son sujet. Ainsi, un scénario peut donner du rythme ou pas au film, encore faut-il savoir le traiter correctement.
En conclusion, on peut penser que les blockbusters d’aujourd’hui ont plus de rythme qu’un Citizen Kane ou un Autant en emporte le vent. Cependant, le rythme ne fait pas forcément la qualité du film, et il ne faut pas trop précipiter l’action sous peine de rendre une copie bien pâle. L’émergence des gros budgets change la donne aujourd’hui, rendant les attentes du spectateur différente. Qu’est-ce que j’en pense ? Il y a toujours eu des films où le dosage d’action et de rythme était totalement raté. On observe simplement que cela arrive beaucoup plus souvent aujourd’hui. Malgré tout, je préfère la période moderne, car, heureusement, le cinéma nous donne encore des perles (Birdman, Whiplash, The Grand Budapest Hotel,…)

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