Cent mille dollars au soleil

? Réalisateur : Henri Verneuil (Un Singe en Hiver, Le Clan des Siciliens)
? Casting : Lino Ventura (L’armée des ombres, Garde à Vue), Jean-Paul Belmondo (L’as des as, Peur sur la ville), Bernard Blier (Les Tontons Flingueurs, Buffet froid)…
? Genre : comédie
? Pays : franco-italien
? Sortie : 17 avril 1964
Synopsis : Aux portes du désert, Castigliano (Gert Fröbe) dirige une entreprise de transports routiers. Steiner (Reginald Kernan) doit conduire un chargement clandestin de cent mille dollars au coeur de l’Afrique. L’apprenant, Rocco (Jean-Paul Belmondo) élimine le chauffeur, vole son véhicule et part avec sa complice (Andréa Parisy). Castigliano promet alors une forte récompense à Marec (Lino Ventura) s’il récupère le camion. Commence alors une folle poursuite…
Henri Verneuil a au cours de sa carrière réalisé bon nombre de chefs d’oeuvre comme La Vache et le Prisonnier, Un Singe en Hiver ou bien Le Clan des Siciliens. A côté de ceux-là, Cent mille dollars au soleil ferait presque office de légèreté, malgré son casting XXL, ses dialogues de Michel Audiard et son grand succès au box-office à l’époque. Alors, Cent mille dollars au soleil mérite-t-il une place au panthéon des immenses films de l’Hexagone ? Tentative de réponse en quelques points.
Trahisons et amitiés dans le désert. Voilà une maxime qui résumerait bien Cent mille dollars au soleil. En se servant du cadre isolé du désert marocain, Henri Verneuil nous questionne sur les notions de l’amitié et des faux semblants. La trahison est de mise tout du long, à commencer par Rocco, joué un Belmondo au top de sa forme, qui se lance dans une course contre-la-montre pour échapper à son meilleur ami Marec. En nous présentant un groupe solide et bon vivant, Verneuil introduit un monde agréable mais illusoire, où notre a priori de départ sur chaque personnage va se morceler au fur et à mesure face à la rudesse de la situation. L’un est là par amour, un autre car il a tout perdu, le dernier car il doit fuir ; autant de destins brisés qui poursuivent un rêve au volant de leur camion, pour un road-trip de plus de 2.000 kms.

En effet, Cent mille dollars au soleil reprend à son compte les codes du road trip et du film d’aventures ; le suspens est palpable tout du long, exacerbé par les nombreux rebondissements, et si le voyage commence gentilement, il ne tarde pas à se transformer en une véritable chasse-à-l’homme, où les seuls moments de répit sont apportés par le sidekick humoristique Bernard Blier, qui donne l’occasion à Michel Audiard de sortir sa plus belle prose. Plus que des hommes, on a l’impression que plus les kilomètres défilent, et plus nos protagonistes exacerbent leur instinct animal, tourné uniquement vers les cent mille dollars de la cargaison de Rocco. Plus on avance et plus on apprend également à les connaître, si bien que le manichéisme gentil/méchant s’efface rapidement ; en humanisant ces bêtes humaines, Verneuil suscite en nous de la compassion pour cet instinct primaire, et un déchirement moral au fur et à mesure que la fin approche. C’est là que réside finalement le message du film : les actions présentes ne sont pas nécessairement le reflet de notre vie passée, et la volonté de besoins inutiles, tel que l’immense richesse qui est ici promise comme un mirage, n’est rien à côté de valeurs morales aussi fortes que l’amitié.

En résumé, Cent mille dollars au soleil mérite amplement sa place au panthéon des films français, tant tout le casting est ici incroyable, tant les dialogues d’Audiard sont efficaces et ciselés, et tant Verneuil est diablement juste. Cent mille dollars au soleil est sans nul doute un des plus extraordinaires et des plus riches films d’aventure, qui, cinquante-cinq ans après sa sortie, arrive encore et toujours à nous mettre des étoiles dans les yeux.
Note
9/10
Oeuvre profondément humaniste, Cent mille dollars au soleil est un film d’aventures, merveilleusement écrit et mis en scène, porté par un casting de haut vol. Sans avoir pris une ride, le film de Verneuil est une petite madeleine que l’on revoit avec toujours autant de plaisir.
Bande-annonce :
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