Découverte de la Quinzaine des réalisateurs, la compétition immersive et un choix cornélien…Récit de la deuxième journée de notre rédacteur Mattéo au Festival de Cannes.
Après une première journée au Festival déjà intense pour Mattéo, le réveil est douloureux. Il faut dire qu’il est toujours épuisant d’entrer dans cette effervescence. Après un film en compétition et le documentaire Ghibli la veille, la Quinzaine des réalisateurs nous tend les bras pour la projection du dernier film du réalisateur espagnol Jonas Trueba, Septembre sans attendre. On peut aisément qualifier ce film d’anti-comédie romantique, lequel n’est pas sans rappeler le screwball d’un couple qui prévoit de se séparer…et de célébrer cette séparation. Screwball…késako ? Il s’agit là d’un genre comique très popularisé à Hollywood grâce au film New-York-Miami de Frank Capra, en 1939. Le genre de la screwball comedy oppose un homme et une femme, généralement en tant que couple en déclin, qui se détestent. Une opposition qui sert de prétexte pour créer des rebondissements qui viendront tester la relation.
Dans Septembre Sans Attendre, on retrouve donc une certaine inspiration de ce genre, donnant lieu à un film délicieux et malicieux, avec des personnages hauts en couleur. Le film vient fournir une petite réflexion sur le couple, appuyé par une performance excellente de la part des acteurs derrière le couple. Ainsi Itsaso Arana et Vito Sanz sont à la fois drôles, attachants et parfois génialement insolents. Puisqu’il s’agissait là de la première séance du film, nous avons pu profiter d’une session de questions-réponses avec l’équipe pour en découvrir davantage sur l’origine de l’oeuvre. Alors qu’il vivait un chagrin d’amour, Trueba a confié avoir été secoué, adolescent, par une phrase de son père, lui conseillant de célébrer sa séparation. À méditer !
la compétition immersive
À l’issue de cette séance, on a voulu s’intéresser à la compétition immersive. En effet, le Festival de Cannes a lancé une autre compétition consacrée aux expériences immersives, c’est-à-dire des installations artistiques. Il s’ouvre de fait à d’autres horizons et ne se limite plus au cinéma, en opèrant là une transition vers le Festival d’art. Ainsi, la compétition immersive se déroule au multiplex Cineum de Cannes ainsi qu’à l’Université Côte d’Azur. Pour s’y rendre, il nous faut donc emprunter le bus, ce qui déclenche un véritable parcours du combattant. Quelle ne fût pas notre surprise lorsque l’on s’est rendus compte que nous étions un jour férié ! Une situation pénible que l’on a compensée avec une pause goûter et un bon cookie artisanal, avant de s’engouffrer dans le Cineum pour découvrir En Amour. À l’entrée, on nous demande de retirer nos chaussures puis on foule le sol sur lequel est installé une large toile qui remonte jusqu’au plafond. L’expérience débute. Au son d’une musique envoûtante, les spectateurs sont invités à déambuler sur la toile, en chaussettes ou à pieds-nus, à écouter l’histoire d’une relation amoureuse puis conjugale. Elle se termine mal jusqu’à la renaissance qu’apporte le deuil.
La mer, des couleurs, un ciel orageux…sur ces fonds virevoltent des paillettes, que nous pouvons effleurer. Alors elles se rejoignent sur le point d’impact de notre doigt, suivent les mouvements de nos mains ou nous évitent, accompagné par la douce voix de la narratrice. En Amour est en fait une oeuvre qui met en avant la sensualité. Si ce n’est ni une expérience exceptionnelle ni excellente, il faut reconnaître qu’un certain apaisement s’en dégage. Pour dire, on imaginait même un adorable jeune couple valsant en douceur au son des quelques fabuleuses musiques acoustiques de l’expérience. En cela, on peut dire que l’immersion est réussie, quoiqu’entravée par quelques malheureux bugs…
The substance ou pas the substance ?
C’est donc le cœur léger qu’on reprend la route vers notre logement. Que s’est-il passé ensuite ? Pas grand chose…si ce n’est un dilemme intérieur : devions-nous aller voir The Substance de Coralie Fargeat, le choc de ce Festival de Cannes ? En effet, les avis généraux parlaient de The Substance comme d’une œuvre visuellement ultra audacieuse, certainement pas faite pour les plus sensibles…au point que nombre d’entre eux ont été pris en charge par les pompiers durant la première. Rien que la perspective de tomber dans les pommes au cinéma avait le don de nous intimider, et au vu des retours sur certaines scènes peut-être que nous n’avions pas le cœur suffisamment bien accroché pour une telle oeuvre. Mais de l’autre côté, c’est sans doute un film important et fort que nous tenions là, jusqu’à ce que les critiques s’accordent à dire qu’il mérite la Palme d’or. À la moitié du Festival, n’est-ce pas un peu tôt ? Ou est-ce véritablement difficile d’envisager un meilleur prétendant pour la suite de la compétition ?
Quoiqu’il en soit nos âmes fragiles ont préféré une soirée plus calme afin de programmer nos prochaines séances, à commencer par Anora de Sean Baker, projeté ce mardi. Il faut dire que les journées sont toujours éreintantes à Cannes alors privilégier une soirée libre n’est jamais de refus. À demain !
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