Pour son premier long-métrage, Drew Hancock nous raconte une histoire d’amour fusionnelle mais qui cache de sombres secrets.

Un début classique…

Il est toujours intéressant de voir les premiers long-métrages des cinéastes. Ils représentent les forces et faiblesses de leurs auteurs, ainsi que les thématiques qui les passionnent. Mais les premiers films souffrent souvent d’un défaut : le désir de tellement bien faire que les réalisateurs appliquent à la lettre les leçons de réalisation ou de scénario. Cela donne ainsi un film plutôt scolaire et linéaire. C’est cette crainte que peut faire ressentir Companion dans son début.

Le film de Drew Hancock débute sur une banale histoire d’amour, un coup de foudre au rayon fruits d’un supermarché, suivi d’un séjour en forêt. Et, il faut bien l’admettre, les premières minutes de Companion n’ont rien de bien passionnant. Enchaînement de scènes clichées, à la réalisation certes maîtrisée (notamment avec une photographie particulièrement bien travaillée) mais d’un certain classicisme académique. Mais, à la fin du premier acte, survient le plot twist du film.

Sophie Thatcher dans Companion © 2025 Warner Bros. Entertainment Inc.
Sophie Thatcher dans Companion © 2025 Warner Bros. Entertainment Inc.

…et tout bascule.

À partir de cet instant (qui a été plus ou moins révélé dans la bande-annonce), le film s’accélère et les événements s’enchaînent. La belle histoire d’amour s’effrite et se complexifie. Et c’est dès ce cap-là que le scénario montre son intelligence. Chaque accessoire, concept ou réplique présenté sera réutilisé plus tard, offrant un magnifique jeu de piste au spectateur où l’on se demandera comment les personnages se sortiront de cette affaire.

Ainsi, Companion prend une tournure de comédie noire bourrée de tension, d’horreur et de beaucoup d’humour. Le tout en traitant des relations toxiques, de la manipulation, des abus dans un couple et d’une misogynie bien crasse. Le film va s’atteler à déconstruire cette image idéale du couple en mettant en lumière des scènes que de nombreuses femmes ont déjà dû subir dans leur vie. Le film joue et manie son concept à la perfection, jusqu’à une scène de fin où, malheureusement, son propos le rattrape, l’obligeant à une facilité scénaristique bien dommage.

Sophie Thatcher et Jack Quaid dans Companion © 2025 Warner Bros. Entertainment Inc.
Sophie Thatcher et Jack Quaid dans Companion © 2025 Warner Bros. Entertainment Inc.

Simple mais efficace

Comme énoncé plus tôt, Companion reste très académique dans sa réalisation, nous faisant regretter un léger manque d’ambition artistique. Cependant, il n’en reste pas moins intéressant et réussi. Tout au long du récit, Drew Hancock nous distille des éléments, en filmant les bons accessoires, au bon moment, pour en raconter autant que nécessaire sans être trop lourd (c’est le cas du fameux twist, mais aussi de beaucoup de morts survenant dans le film).

Le tout est servi par un casting formidable, avec notamment un duo qui assure. Après Heretic, Sophie Thatcher démontre encore une fois qu’elle excelle en héroïne de film d’horreur, tandis que Jack Quaid joue très bien le rôle du petit copain incel, toxique et ridicule.

Alerte spoiler !
Afin de faire une critique complète du film, il est nécessaire de révéler le fameux plot twist qui survient à la fin du premier arc. La lecture de ce qui va suivre n’est pas recommandée à ceux n’ayant pas vu le film.

L’introduction de cette idée de « robot de soutien émotionnel » (et qui est en réalité un robot sexuel), comme le présente Josh, le personnage joué par Jack Quaid, aurait pu donner lieu à un film bien trop simple. Une histoire qui n’aurait été qu’un remake de Terminator façon Rom Com (un projet qui peut séduire les cinéphiles les plus excentriques). Cependant, Companion arrive à très bien s’en sortir, proposant une réflexion passionnante sur la nature d’un être doué d’intelligence. Une entité dotée de souvenirs, pouvant ressentir des émotions, des sentiments, des sensations comme la douleur, quand bien même factices, ne correspond-elle pas à ce que l’on définit comme un être humain ?

Alors oui, ces thématiques ont déjà été énormément traitées dans la science-fiction. Mais le fait de les aborder de manière aussi directe et réaliste rajoute une couche passionnante à ce récit. Et, en réalité, la condition de machine d’Iris (Sophie Thatcher) importe peu. Josh, cet homme qui se considère comme un « homme bien », le petit ami parfait qui mérite le bonheur, voit toutes les femmes comme des robots destinés à assouvir les besoins des hommes.

Companion contient donc un double propos. L’un sur l’intelligence artificielle, et notamment les questions éthiques et morales. Peut-on supprimer une entité douée de conscience ? (nous questionnant ainsi sur notre rapport à la peine de mort). L’autre propos concerne les injonctions que la société impose aux femmes : ne pas être trop intelligentes, trop agressives, bien dociles et au service de leur compagnon. Au final, qu’est-ce qui distinguerait une femme et un robot dans l’esprit de ces gens-là ? Quand bien même certaines thématiques peuvent sembler peu approfondies par moments, elles n’en restent pas moins intéressantes. Companion parvient donc à proposer des réflexions stimulantes tout en restant un très bon divertissement.

Voir la bande-annonce :

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